Mila se réveilla doucement, grâce au chant des rares Pokémon oiseaux qui vivaient aux Pics de Sakai. Elle se frotta les yeux, puis les posa immédiatement sur son Elecsprint. Amarok venait d’évoluer la veille, et la jeune femme était très fière de lui, et un peu d’elle-même aussi. Leurs efforts avaient fini par porter leurs fruits, et l’érudite avait hâte de continuer sur cette voie. Aux côtés du loup se trouvait également une petite pierre chromatique, du nom de Surtr. Ce Pokémon roche n’était que très récent dans l’équipe, puisque la capture datait de la veille ! La jeune femme gardait un œil particulier sur le petit mâle, car la capture ne s’est pas passée comme prévu. Se sentant coupable, la Bleuette est incapable de le laisser trop longtemps dans la Ball pour le moment. Bien entendu, le Nodulithe est ravi. Néanmoins, cela représentait un inconvénient pour l’équipe au complet. Mila se devait d’être plus attentive, et plus lente, dans son quotidien. De plus, elle ne trouvait pas cela équitable pour ses autres créatures. Cela dit… L’idée de se balader avec toute son équipe dans le campement ne plaisait pas trop à la demoiselle. Elle imaginait déjà la tête de son pauvre frère lorsqu’il verrait cela. Mais elle était tout de même incapable de se résoudre à rentrer la créature dans la Ball, par peur que quelque chose arrive durant ce laps de temps.

Alors voilà, le Nodulithe faisait ce qu’il lui plaisait, incluant le fait de dormir avec l’Elecsprint. Le grand mâle comprenait la position délicate de son humaine, alors il prenait sur lui. En tout cas, c’était un nouveau jour qui commençait pour la demoiselle aux cheveux bleus. Elle n’avait pas vraiment hâte de sortir du lit. Pas parce qu’il faisait froid à l’extérieur, mais bien parce qu’aujourd’hui, elle avait quelque chose de très important à faire… S’entretenir sérieusement avec son ami de Ran : Balthial Zajin. En effet, c’était le moment ou jamais pour revenir sur leur relation après l’évènement du Lac Noctali. Le Ranin allait bientôt repartir pour son royaume, alors la Bleuette n’avait plus la possibilité de repousser l’échéance. Bien entendu, elle voulait avoir cette conversation pour mettre les choses au clair. Cela ne serait que bénéfique au duo. Mais d’un autre côté, elle redoutait vraiment ce moment… Ses sentiments étaient encore chamboulés par leurs aventures. Et ce n’était pas Ayden qui aidait. Néanmoins, le destin avait voulu précipiter les choses, tout simplement. Mila devait faire preuve de courage et se tenir à sa promesse. Elle voulait révéler les raisons de son refus sur l’îlot mystérieux… Pour pouvoir libérer le cavalier de sa tourmente. C’était son devoir.

Résolue, la jeune femme se décida finalement à se lever. Elle fut rapidement saluée par ses deux Pokémon, qu’elle gratifia de caresses tremblantes. L’érudite s’assura ensuite que toutes ses Captis Ball étaient à leur place, et elle salua chacun de ses compagnons dans le même temps. Ensuite, c’était le moment pour un peu de toilette et pour s’habiller. Quelques minutes plus tard, la demoiselle était prête à quitter sa zone de confort. Elle avait donné rendez-vous à Balthial dès qu’il serait réveillé, à l’autel construit par le lancier et son groupe. C’était un lieu symbolique dans tout le campement, et Mila ne pouvait pas rêver mieux. Certes, cela pouvait faire prétentieux, mais pour la Bleuette, c’était le meilleur endroit possible pour faire des confessions.

Elle soupira. Que le temps passait vite désormais ! La pauvre noble avait encore tant de choses à faire. Mais la plus urgente, celle qu’il fallait régler ce jour-ci, c’était de s’entretenir avec le jeune homme. Ce serait difficile, mais la jeune femme n’avait pas le choix. Pour se donner du courage, elle rangea ses Balls dans son sac qui l’accompagnait partout. Ainsi, elle avait ses compagnons à ses côtés, en plus d’Amarok et de Surtr. L’érudite quitta ensuite sa tente, feintant la bonne humeur alors qu’elle avait le moral au plus bas. Le pas tremblant, elle se rendit directement à l’autel pour se trouver une place sur une roche de bonne taille. Elle attendait désormais l’arrivée du Ranin. Heureusement, Ayden était de sortie pour une mission. Il ne viendrait pas interférer dans la conversation… Le grand-frère jumeau était de bonne compagnie, mais il avait tendance à traiter Mila comme une enfant, surtout lorsque ce n’était pas le bon moment… Quoique. En y repensant, l’érudite aurait peut-être préférait qu’il soit là, avec elle. Non. Cela aurait été une mauvaise idée ! C’était un moment intime, impossible à partager… Décidément, la jeune femme n’avait pas la tête sur les épaules pour le moment.

La Bleuette attendait, sur son rocher. Elle passait le temps en observant les mouvements aléatoires de son Nodulithe. Sa roche étincelait sous le Soleil, c’était un spectacle magnifique. Mila se demandait alors si elle aurait, un jour, la chance de rencontrer un autre Pokémon de ce type. Elle se demandait aussi à quoi aurait pu ressembler Amarok, ici présent, s’il avait chromatique à son tour. Il faudrait que la demoiselle se renseigne un peu plus sur ce phénomène offert par la Nature. Cela lui ferait un autre sujet d’étude que les Pokémon légendaires, de quoi sortir des sentiers battus ! Elle en avait vraiment besoin après tout. Changer d’air avec la montagne était une bonne chose, mais déjà s’installait des doutes quant au futur. Pour son métier, mais également pour sa relation avec Balthial… L’issue de cette conversation serait déterminante pour leur vie respective. Peut-être qu’ils allaient passer encore beaucoup de temps ensemble. Ou à l’inverse, peut-être que le Ranin rentrerait chez lui pour de bon… La perspective de tout cela mettait Mila mal à l’aise.

Heureusement, elle connaîtrait le fin mot de l’histoire bientôt, car justement, le cavalier venait d’arriver. Il salua la demoiselle, et elle ne put s’empêcher de sourire. Balthial était effectivement en retard, mais il n’avait pas tort sur un autre point : la Bleuette était matinale et ponctuelle ! Et ce depuis sa plus tendre enfance. C’était un point qui divergeait avec son frère. Ayden avait, autrefois, la mauvaise habitude de dormir un peu trop le matin. Il rêvait de retourner dans son lit après la lecture de la journée. Par chance, il suffisait de lui parler d’entraînement à la lance pour le motiver. Mais désormais, cela n’était plus d’actualité. L’Azuré avait beaucoup de responsabilités sur le dos pour se permettre de faire la grasse matinée. La preuve : voilà qu’il était parti avant l’aube pour accomplir une mission, en compagnie des autres mercenaires aux masques.

Enfin, pour en revenir à Balthial, il se posa sur une pierre, de façon similaire à son amie de Sakai. Maintenant, ils se faisaient face. Cela ne rassura pas vraiment la jeune femme qui recommençait à se sentir mal à l’aise. Elle avait peur d’aborder le sujet de leur lien, et de ce qu’il s’était passé au Lac Noctali. Elle n’avait pas oublié comment le Bleuté avait pris son refus. Ce fut un moment terrible, et en toute honnêteté, Mila ne voulait pas y revenir. Cela dit, il était impossible d’esquiver le sujet plus longtemps. Avec du courage, l’érudite se décida à commencer la conversation.


Autant commencer en douceur pour ne pas alerter le jeune homme. Le regard de Mila divagua sur Surtur, le Nodulithe fraichement capturé. Il avait de la chance, ce Pokémon. Il vivait au jour le jour, sans se préoccuper de quoi que ce soit. La demoiselle, elle, avait des devoirs qu’elle s’empressait de remplir…


C’était une question classique, mais qui avait son importance. En effet, si Balthial n’aimait pas le paysage montagnard, cela pouvait vouloir dire qu’il n’avait pas l’intention de revenir. Ce qui serait une mauvaise nouvelle, assurément. Cela dit, la Bleuette ne laissa pas son ami répondre tout de suite. Une autre question lui brûlait les lèvres.


Mila s’en voulait encore pour ce contretemps. Elle n’avait pas voulu que le cavalier se fasse mal en faisant une démonstration de force. Elle avait simplement voulu détendre l’atmosphère et continuer de convaincre Ayden sur le bon vouloir du Ranin.

Balthial commença à se prendre au jeu de l’interrogatoire rapidement. Tout d’abord, il clarifia les choses au sujet de son dos. Il allait beaucoup mieux grâce aux plantes apportées par les Pokémon ! Cela était une nouvelle qui réjouissait la jeune femme. Un sourit naquit alors sur son doux visage, chassant un peu de son stress au passage. Mila triturait un tissu dans ses mains, qu’elle avait sorti uniquement pour pouvoir passer ses nerfs dessus. Non pas que l’érudite était en colère, mais elle avait besoin de cela pour ne pas perdre la tête et fondre en larmes. Malgré son détournement de conversation, la Bleuette ne pouvait pas s’empêcher de penser à la suite. Heureusement, le cavalier était là pour apporter un peu de gaieté grâce à ses paroles. Mila était heureuse de savoir qu’il se plaisait bien, ici, au campement. Cela voulait dire qu’avec un peu de chance, il reviendrait après son séjour… Un sentiment bien égoïste qui fut coupé court par la suite des paroles du fils Zajin.

Il avait compris. Le petit stratagème de Mila n’avait pas fonctionné. Oh, bien entendu, la jeune femme était satisfaite de savoir que son ami était en bonne santé et qu’il aimait vivre dans la montagne. Ce n’était donc pas en vain, ces petites questions. Mais désormais, il fallait entrer dans le vif du sujet. Pas de retour en arrière, pas d’échappatoire. L’érudite avait voulu ce rendez-vous alors elle devait s’y confronter. Pour le meilleur ou pour le pire. Peut-être que, quoi qu’il advienne, Balthial en ressortirait plus fort. Mais cela pouvait aussi avoir un effet dévastateur, comme le jour au fameux lac… Mila inspira profondément, aidée par son fidèle Amarok.

Les mains de la Bleuette jouaient de plus en plus avec le tissu. Elle se sentait de plus en plus mal à l’aise, mais le sujet lui brûlait le cœur pendant ces derniers jours. Il était temps de soulager sa conscience.


Parce que… ?


Et encore en ce moment-même, elle hésitait à en dire plus. Elle hésitait à faire le premier pas pour donner une réponse concrète au Bleuté. Pourtant, Mila lui devait cette réponse ! Oui, ou non. Accepter les sentiments du cavalier, ou en rester là, en tant que simple amis. Le plus importait était de donner une réponse. Mais la timidité de la jeune femme la rattrapait finalement. Elle n’avait jamais eu l’occasion d’être aussi proche de quelqu’un, hormis son frère jumeau. Toutes ces années, elle avait été presque seule. Peut-être un lien, ou deux, entre érudites entre autre. Mais ce fut tout. Alors que pouvait-elle faire maintenant ? La marche à suivre, Mila ne la connaissait pas. Elle était incapable d’imiter le Ranin et d’avouer ses sentiments sur un coup de tête. Même la présence d’Amarok et de Surtr n’y changerait rien. Juste une petite aide en plus…

Balthial était lui aussi dans une situation délicate, et bien que la demoiselle s’en doutait, elle était incapable de sortir les mots que l’homme espérait tant. C’était dans sa nature, de doutait et d’avoir du mal à exprimer ses sentiments. Mila n’avait pas eu la chance de grandir dans un village tranquille où elle aurait pu jouer avec les autres enfants. Courir dans les rues après les Pokémon, dire bonjour au boulanger et au poissonnier chaque matin… Ce n’était pas un plaisir qu’avait eu la jeune noble. Comme quoi, il ne servait à rien de naitre dans une famille aisée si cela signifiait ne pas pouvoir gouter à la liberté et profiter pleinement de son enfance. Bien entendu, Ayden avait toujours été cette personne qui comblait le vide social de la vie de l’érudite. Mais c’était insuffisant pour s’épanouir complètement.

Ainsi, à vingt-cinq ans déjà, la jeune femme était incapable de trouver des mots sur ce sujet sensible qu’était l’amour. Pourtant, beaucoup de dames étaient déjà mariées à sa place. Mais c’était ainsi que le destin avait choisi de guider Mila. Et elle se retrouvait à présent dos au mur. Pourtant, le cavalier était fort aimable. Il partageait la vision de la Bleuette, compatissant à son égard. Il proposa même à la demoiselle de changer de confident, afin de libérer son esprit même sans le principal intéressé. Mais c’était impossible. Elle n’avait pas besoin de s’entretenir avec son frère pour ce sujet en particulier. Mais bel et bien avec le Ranin, et personne d’autre. Puis ce fut des excuses, une nouvelle fois. Ce n’était pas à Balthial de s’excuser, c’était à celle qui lui faisait face. C’était elle la fautive dans cette situation. Mila ne voulait pas s’ouvrir et son silence faisait souffrir autant son cœur que celui de son ami.

D’ailleurs, le silence en profitait bien pour s’installer entre les deux interlocuteurs. La Bleuette ne trouvait pas la force d’ouvrir la bouche, et plus le temps passait, plus c’était difficile. Parfois, il fallait savoir se jeter à l’eau sans réfléchir, sous peine d’être incapable de franchir le pas par la suite. Mais Mila n’était pas au courant de cela, elle qui n’y connaissait pas grand-chose en relation avec autrui. Elle pensait pouvoir garder ses secrets et les choses qui lui faisaient mal, pour pouvoir les ressortir le moment opportun. Mais non. C’était une opération un peu plus compliquée que cela. Heureusement, la jeune femme n’était pas seule. Son Elecsprint lui donnait des coups de museau réconfortants de temps à autre. Quant au Nodulithe, son insouciance était source d’inspiration. Il vivait sa vie comme il l’entendait et s’attirait parfois des ennuis, mais au final, il était satisfait. Peut-être que l’érudite pouvait réellement prendre exemple sur le petit Surtr…

Elle inspira une bonne bouffée d’air, avant de souffler doucement. Son cœur battait très fort, elle l’entendait résonner en elle. Un peu de courage Mila.


Encore raté. Mais c’était un début. Reprenant ainsi la parole, la Bleuette ne pouvait pas s’arrêter ainsi. Elle le savait.


Un nouveau soupir.
Même les caresses sur Amarok n’étaient pas suffisantes pour apaiser Dame Valni. Elle avait laissé son tissu de côté pour éviter de l’abîmé tant la situation était stressante pour la demoiselle. Pourtant, Balthial n’était pas n’importe qui, comme il l’avait si bien dit. Ils étaient amis après tout. En fait, le cavalier de Ran avait même quitté son royaume pour elle. Encore une fois, cette vérité était choquante pour l’érudite. Elle n’aurait jamais pensé cela possible. D’ailleurs, à sa place, l’aurait-elle accompagné dans un voyage incertain ? Peut-être que oui, peut-être que non… Seuls les sentiments pouvaient apporter une réponse positive. Dans le cas contraire, cela aurait été un non car quitter Krishna et son travail, ce n’était pas envisageable. C’est ce que Balthial avait fait. Il n’avait pas écouté sa tête, mais son cœur. La Bleuette se devait de lui rendre hommage en déliant sa langue. Elle pouvait prendre exemple sur son ami.

Oublier sa raison, sa tête un instant. Pour n’écouter que la voix du cœur et des sentiments…


… Possible. Mais était-il réellement infranchissable ?


Si les mots ne sortaient pas, les gestes pouvaient les remplacer. Mila se leva, quittant son rocher et ses Pokémon. Elle se dirigea vers le cavalier, la tête basse, avant de l’étreindre doucement.

La conversation avançait lentement mais surement.

Mila était incapable d’articuler mot. Elle resta dans les bras de Balthial, sans rien faire. Au début, le jeune homme fut totalement décontenancé par un tel comportement. Il fallait le comprendre ! Mais une fois la surprise passée, il enlaça la Bleuette à son tour, tout en lui chuchotant des paroles rassurantes. Il tenait vraiment à elle… C’était une véritable torture pour l’érudite. Si elle avait eu une enfance plus riche en rencontre, elle n’aurait jamais eu autant de mal à parler en ce moment même. Elle n’aurait pas eu à faire autant souffrir son ami épéiste. Un ami. Non. Balthial n’était pas son ami.

La jeune femme se redressa. Elle avait les yeux humides à présent. Les mots du Ranin lui allaient droit au cœur, et cela rendait la situation encore plus difficile. Bien sûr, la jeune femme était rassurée d’entendre les propos du Bleuté. Mais elle ne pouvait plus s’esquiver désormais. Pour tout dire, il avait même employé ce fameux surnom qu’était Princesse. Mila ne le connaissait, à la base, que de la bouche de son ancien tuteur. Mais ensuite, ce fut au tour des hommes masqués de l’utiliser, et enfin, Balthial… Cela était vexant dans un sens, mais touchant dans l’autre. La Bleuette se savait noble mais au point d’être une princesse ? Elle en était encore bien loin. Sa bonté n’avait d’égal que son égoïsme, alors comment parler de princesse avec cela ?

Cependant, il fallait bien avouer que cela faisait un choc à Mila. C’était ce petit quelque chose qui réveillait son esprit et sa réflexion. Pourquoi Balthial l’avait-il appelé ainsi ? La réponse était pourtant très simple, en y réfléchissant. Contrairement à Démolosse et Feunard, ce surnom-là était employé dans l’unique but de rassurer la demoiselle. C’était un mot affectueux, tout simplement. Tout comme on dirait « mon chèri » ou « mon amour » à son âme-sœur. C’était sans arrière-pensée.  Princesse… C’était mignon, et irritant à la fois. Mila n’aimait pas qu’on la traite comme une héritière du trône justement, car cela plaçait sa personne sur un piédestal. De plus, Dame Valni ne se sentait pas assez « femme » pour mériter un tel qualificatif. Mais en cet instant précis, c’était juste une façon d’exprimer des sentiments. Le cavalier voulait simplement renforcer le fait qu’il tient à l’érudite, comme il l’avait déjà avoué.

Mila devait prendre une décision. Très simple, et pourtant difficile à prononcer.

Aucun retour arrière possible. Il fallait assumer et se montrer digne de l’amitié de Balthial. La jeune femme était celle qui avait voulu cette conversation. Elle ne pouvait plus se cacher derrière des mensonges et de vagues propos. Non, pire encore. Elle n’en avait pas le droit.


C’était un début. Mila chercha ses mots, et une idée lui vint. Elle pouvait déjà commencer par expliquer son comportement au Lac Noctali.

Sans compter bien entendu le fait que la révélation tombait au pire moment.

Il était vrai que Balthial avait failli mourir pour rien. Un sacrifice qui aurait été vain et qui aurait laissé le cœur de Mila à blanc pour le restant de ses jours. En scellant leur relation, nul ne doute que le cavalier serait encore plus tenté de prendre tous les risques pour protégée l’élue de son cœur… Mais ce n’était pas tout. La Bleuette avait repris un air plus calme et plus sérieux. Elle regardait à droite, ou à gauche, mais elle ne pleurait pas. Ses paroles étaient sincères, tout simplement.

Le lancier était effectivement une variable à prendre en compte, dans le passé. Son comportement était imprévisible avant de l’avoir revu. Mais, heureusement, l’Azuré était resté fidèle à lui-même, généreux et plaisantin. C’était un problème de moins.


Cette révélation était lourde de sens. Peut-être que Balthial n’aurait pas surmonté l’épreuve de perdre Mila de toute façon. Mais la demoiselle avait eu le doute au lac. Elle n’avait pas pu se permettre de répondre favorablement à cause de toutes ces raisons. Mourir et précipiter la mort du Bleuté. Ayden. Et enfin, accentuer le devoir de protection du Ranin. C’était légitime comme arguments. Mais désormais, l’un d’entre eux n’avait plus lieu d’exister car Ayden était même prêt à donner sa bénédiction. Il ne restait donc que les deux autres… Néanmoins, quels poids ! L’érudite savait que si l’amitié allait plus loin, alors le jeune homme deviendrait encore plus vigilent. Cela dit… C’était inévitable, quoi qu’il arrive. Son amour pour Mila et son sens du devoir étaient trop forts. La Princesse venait de le réaliser au cours de cette conversation. Le Ranin lui resterait fidèle, coûte que coûte. Tous les arguments de la jeune femme ne trouvaient plus d’écho.

Après de telles révélations, elle se sentait mieux. Libérée des chaînes de sa raison, la demoiselle respirait enfin. Elle avait dit ce qu’elle avait à dire. C’était une justification pour se faire pardonner du mal causé au Lac Noctali, en quelque sorte. Mais Mila n’avait pas le droit d’en rester là. Maintenant que son cœur était ouvert, il fallait donner une réponse nette et précise. Accepter les sentiments de Balthial, ou bien rester simplement des amis ?


Elle gagnait encore du temps. Un soupir.

Mila piétina le sol, elle avait la gorge sèche.


C’était sa façon à elle de dire « oui, je vous aime moi aussi » !

La demoiselle se sentait mieux désormais. Elle n’avait plus ce lourd poids qui lui écrasait le cœur sans relâche. Dès à présent, Balthial savait tout, y compris que les sentiments de sa belle dame étaient réciproques. Pour la suite, c’était à lui de voir car Mila était comme tétanisée, malgré son sourire. Elle l’avait enfin dit ! D’ailleurs, une réaction surprenante répondit à l’appel de son cœur car le Ranin tomba de là où il se trouvait, sous le choc. Mais rapidement, le Bleuté se releva, tout sourire et il avait de quoi l’être ! Il enlaça tendrement sa promise, puis le duo profita de l’instant, tout simplement. De leur côté, les Pokémon de la Bleuette avaient deux réactions bien différentes. Amarok était heureux pour son humaine, il sautait dans l’air pour exprimer sa joie. Quant à Surtr… Il était égal à lui-même. Son œil unique observait le loup, puis les êtres humains, puis le loup. Il ne saisissait pas l’émotion du moment, pour lui, il n’y avait pas de cailloux à lancer donc c’était banal.

Mila resta encore dans les bras de son cavalier quelques instants. Cela dit, ils n’allaient pas rester ainsi toute la journée ! C’était donc les rouges écarlates que la demoiselle se retira, pour sourire à Balthial. Elle osait à peine le regarder, mais ce n’était pas douloureux de la voir réagir de cette façon. C’était tout simplement sa façon de faire. Après tout, répondre à l’amour de sa vie lui avait pris beaucoup plus de temps que prévu. Il lui fallait donc quelques minutes pour réellement assimiler le concept. Heureusement, le Bleuté était très patient, et toujours un peu sous le choc. Mais une fois l’émotion passée, la Bleuette reprit la parole la première.

La question pouvait paraître un peu naïve, mais elle était posée avec sincérité. C’était dans l’éducation de la noblesse de se comporter de cette façon. Avec son frère, c’était logique d’être familière. Mais avec le cavalier, ce n’était pas la chose. L’homme pouvait encore exiger qu’on ne le tutoie pas. Le fils Zajin n’était pas de ce bord-là, alors d’un signe de tête, il acquiesça. Une bonne chose de faite ! A présent…


Mila était à moitié sérieuse et à moitié en train de plaisanter. Elle ne voulait pas faire peur à celui qui partageait désormais sa vie. Mais malgré tout, la jeune femme était claire et sa position ne changerait pas : pas question de continuer cette histoire de sacrifice. Balthial avait tout intérêt à retenir la leçon une bonne fois pour toute. Il savait que sa femme était capable de lui faire regretter ses actes à présent, et elle n’hésiterait pas ! C’est qu’elle avait son petit caractère, une fois amadouée.


La belle ne résista pas à l’envie de retourner dans les bras du Ranin qu’elle aimait tant. Cela faisait bien longtemps qu’elle en rêvait, en fait. Depuis leur première rencontre, l’érudite savait qu’un lien unique les unissait. Dans le passé, elle ne savait pas encore qu’il s’agissait d’amour, mais cela n’avait pas d’importance car une profonde amitié était précieuse. Mais Zekrom devait en avoir décidé autrement ! Le dieu dragon voulait peut-être que celle qui priait avec tant de ferveur pour lui trouve l’âme-sœur pendant sa quête. C’était idyllique, presque un conte, mais dans la tête de Mila, c’était ainsi.

Elle ne bougea pas d’un pouce, toujours dans les bras de Balthial. Ce serait au jeune homme de briser le contact, petite ruse de la part de la Bleuette !

Mila fut satisfaite lorsque son bien-aimé rompit le contact de lui-même. Au moins, elle n’avait pas eu à le faire ! Cela dit, la demoiselle s’attendait à une remarque amusante à ce propos, mais il n’en fut rien. Balthial avait plus important à faire, comme répondre à sa dulcinée sur le sujet de la protection. Le cavalier plaisanta alors à moitié, se permettant même d’inclure Amarok dans la confidence. Le Pokémon aboya à cela, effectivement le Ranin n’avait pas intérêt à trop en faire, sous peine d’éclipser le loup et toute l’équipe de l’érudite ! C’était amusant et Mila se permit même un petit rire, alors qu’à la base, le sujet est vraiment très sérieux. Balthial avait le don de pouvoir dédramatiser les choses, parfois.

La suite était moins réjouissante cependant. En effet, le cavalier s’exprima sur le fait qu’il devrait bientôt partir pour Ran. Evidemment, c’était prévu depuis le début, mais la demoiselle avait repoussé ce jour fatidique dans sa tête. Elle n’avait pas envie de voir partir le Bleuté, et encore moins maintenant qu’ils s’aimaient réellement ! Mais le sort en avait décidé ainsi. Le Ranin ne pouvait pas se permettre de disparaitre, purement et simplement, de son royaume. Il devait prévenir l’armée et la cheffe. La Bleuette espérait qu’il prendrait la décision de revenir à Sakai, bien que cela n’était pas encore gagné d’avance. Bien sûr, c’était un désir égoïste, encore une fois. Il avait le droit de faire ce qu’il voulait, tout comme l’avait fait Mila la première. Vivre sa vie comme il l’entendait… La jeune femme pouvait alors considérer le fait de partir pour Ran, elle aussi. Et de finir par s’y installer, avec son homme. Mais cette perspective d’avenir n’était pas sa préférée car elle signifiait de devoir abandonner tout, encore une fois. Ayden, sa terre natale et les légendes associées… Il faudrait prendre le temps de la réflexion.

Dans un premier temps, Balthial devait rentrer chez lui et ils aviseraient plus tard. Mila ne savait pas encore quoi faire elle aussi. Partir voir Krishna pour lui annoncer les nouvelles ? Rester avec Ayden et devenir mercenaire ? Car son métier d’érudite s’en trouvait compromis pour le moment. Tant de doutes et si peu de temps pour y réfléchir. Cela dit, la jeune femme écarta son propre problème. Avant, il fallait s’occuper du cavalier de son cœur.

Une main sur le cœur, la Bleuette donnait l’impression d’être triste et de s’excuser à la fois. Elle n’oubliait pas le fait que si le Ranin s’attirait des ennuis, ce serait de sa faute.


Une punition serait effectivement problématique. Très problématique. Balthial pouvait, par exemple, finir en prison pour motif de désertion. Mais sa liberté pouvait tout aussi bien lui être rendue… Mila avait vu la jeune femme en charge de Ran lors du Grand Conseil. Cette dernière dégageait une aura douce et délicate. Alors avec un peu de chance, le couple s’en sortirait bien dans toute cette histoire. Jusqu’au prochain problème bien entendu : celui de la noble.


Cela pouvait sonner faux, mais non, Mila était vraiment sérieuse dans ses propos. Si le jeune homme décidait de rester chez lui pour continuer d’exercer son métier de cavalier, alors sa femme n’avait pas le droit de s’y opposer. Ce n’était pas comme s’ils allaient fonder une famille sur le champ, de toute façon… Balthial avait donc carte blanche pour retourner dans sa patrie et décider de la marche à suivre. Pour le reste, le duo pouvait aviser plus tard.

Mila n’aimait pas trop le ton actuel de la conversation. Tout cela était bien trop sérieux à son goût, surtout après avoir conclu leurs sentiments. Mais c’était là la dure réalité de la vie. Le bonheur s’accompagnait très généralement de problèmes à résoudre, ou non. Encore que, discuter de leurs futurs respectifs n’avait pas à être douloureux, c’était quelque chose de naturel. Cela dit, l’optique d’une séparation planait au-dessus de la tête du couple nouvellement formé, et c’était cela qui faisait peur à l’érudite. C’était pour cette raison qu’elle aurait voulu parler d’autre chose… Mais c’était inévitable.

Heureusement, Balthial était là pour calmer le jeu, comme il savait le faire. Il assura à la Bleuette que son cœur lui appartenait et à personne d’autre. C’était déjà un bon moyen de la rassurer. Mais une petite blague en plus était la bienvenue ! D’ailleurs, Mila ne se gêna pas pour accompagner son homme dans son rire. Soudain, le cavalier commença à se mouvoir de façon inattendue. Il recula d’un pas, rompant le contact préalablement établi. La demoiselle était curieuse, et heureusement, elle n’avait pas à se languir de savoir quel était le problème. Mais il ne s’agissait pas d’un problème, finalement. En fait, c’était complètement le contraire, car le Ranin avait un cadeau pour sa dulcinée ! La Bleuette était très surprise, elle tendit les mains tout en fermant les yeux…

En les rouvrant, elle découvrit avec stupeur une Captis Ball. L’objet rond était très énigmatique, mais il contenait assurément un Pokémon. Pour un cadeau, c’était un beau cadeau, et ce, avant même de savoir de quelle espèce était la créature. Cela n’avait pas vraiment d’importance pour la jeune femme, elle qui aimait les Pokémon à la folie. Néanmoins, Mila ne savait pas vraiment comment réagir. C’était tellement incroyable ! Balthial avait fait mouche s’il son intention était de surprendre la dame et de lui faire plaisir. Elle resta bouche bée un moment, le regard fixé sur ses mains et la sphère. Ce fut Amarok qui réagit le premier. Il s’approcha, curieux lui aussi. Sa tête s’avança vers l’objet, puis il se mit à renifler, c’était un réflexe pour lui. Intrigué, il remuait la queue doucement. L’Elecsprint avait hâte de découvrir un nouveau partenaire, mais dans le même temps, il restait un peu sur ses gardes. Quant à Surtr, le petit caillou finit par se placer aux côtés de l’humaine, en voyant le loup faire. Mais de sa taille de Nodulithe, il n’y voyait rien.

Après quelques secondes de plus, Mila cligna des yeux. Elle reprenait un peu ses esprits. En temps normal, personne ne réagit de cette façon. Mais pour la Bleuette, l’offre de son amoureux était extraordinaire. Les Pokémon étaient tout pour elle, elle les aimait du plus profond de son cœur. Après tout, l’un de ses rêves ultimes était d’avoir un monde où humains comme Pokémon peuvent vivre main dans la main. Alors là… Un nouveau compagnon, de manière si spéciale… Ce lui faisait extrêmement chaud au cœur. Finalement, la demoiselle se décida à libérer la mystérieuse créature pour en savoir plus. Mais avant, elle s’assura que son homme ne plaisantait pas.


Mais un hochement de tête et un sourire finirent par convaincre Dame Valni. Elle rendit le sourire et lança la Ball dans les airs. L’objet libéra alors le Pokémon dans un flash, et quel flash ! La créature était tout simplement… Phénoménale ! Sa taille, sa carrure, tout était impressionnante chez cette Onix. Heureusement, Mila connaissait déjà cette espèce de serpent rocheux. Cela dit, elle ne put s’empêcher de s’exclamer devant la beauté de l’animal.


Le femelle géante toisa la demoiselle et ses Pokémon un instant, avant de détourner la tête. Elle n’avait pas l’air du genre à se faire des amis au premier coup d’œil. Et puis cette couleur, elle était spéciale, n’est-ce-pas ?


Mila peinait à retenir son excitation. La Onix était vraiment impressionnante, ce qui accentuait l’envie de crier de l’érudite. Elle voulut tenter une approche par la suite, mais il manquait quelque chose.


La Bleuette se retourna vers son cavalier, toute sourire. Elle avait hâte de faire connaissance avec cette grande dame de pierre.