Mila sentait les battements de son cœur dans ses tempes. Elle venait de posé l’ultime question, celle qu’elle avait déjà évoqué, dans sa tête, plus tôt. Celle qui, si elle recevait une réponse positive, changerait le destin de la demoiselle mais aussi de son acolyte de Ran… L’enjeu était important, lourd et pesant. Ainsi, la jeune femme pouvait s’attendre à ce que le cavalier renonce, pour le bien de sa patrie et pour son propre bien. Il avait tout à Ran. Son métier, sa famille peut-être ? Ses attaches et ses liens… Alors pourquoi suivre une simple érudite dans sa folle aventure en plaquant toute sa vie derrière soi ? Pourtant, ce fut le choix décidé par le fils Zajin. Quelque peu surprise, Mila fut rassurée de savoir qu’elle serait accompagnée pour son futur voyage. Par son ami qui plus est… C’était un rêve qui devenait réalité, en quelques sortes. La Bleuette avait déjà voulu inviter le Ranin dans son royaume d’origine, mais elle n’avait jamais eu le courage de le lui demander. Désormais, c’était chose faite et les deux humains devraient faire un trait sur leur passé.
Mais le temps n’était pas encore à la réflexion. L’érudite avait un mal de crâne puissant après sa rencontre des plus déroutantes avec l’individu masqué. Sans oublier les précédentes rencontres avec les Pokémon sauvages. D’ailleurs, l’équipe de Mila n’était pas en grande forme. Elle pensa notamment à Amarok et à Garuda, qui avaient combattu avec vaillance. Mais ce n’était pas tout. Balthial souffrait lui aussi, de sa blessure. Elle n’était pas profonde, ni alarmante pour le moment. Cela dit, le sang gouttait, et c’était suffisant pour que Mila ait des frissons dans l’échine. Elle n’avait pas voulu que le jeune homme se blesse pour la protéger. Cependant, c’était certainement le début de leur aventure. Peut-être qu’ils finiraient couverts de cicatrices plus tard ! Cette sombre pensée fit du mal à l’érudite, qui fit alors son possible pour l’oublier. Le temps présent était le plus important.
Mila observait Balthial en silence. Il caressait ses Pokémon et avait récupéré son épée grâce à Sleipnir. Il avait ensuite proposé de repartir à l’auberge afin d’obtenir un repos bien mérité. Bien sûr. C’était la meilleure chose à faire. Mila ne se sentait pas bien désormais. Elle avait la tête qui tournait et un peu de maux de ventre. Elle ramassa donc ses affaires au sol, à cause de sa chute. Puis son épée. Elle regarda sa lame un instant, sentant la honte la recouvrir tel un linceul. Une arme pouvait bien être de bonne facture, si elle ne servait pas à défendre son maître, elle était inutile… Mais c’était la faute de Mila uniquement. Laissant ce propos de côté, elle rangea Sieglinde dans son fourreau et l’érudite souffla. Avant de rentrer, elle avait quelques petites choses à dire à son ami.
« Je vous remercie pour… Votre décision. Mais… Je sais que votre colère parle pour vous en grande partie. » Après tout, la demoiselle n’avait jamais vu le cavalier de la sorte. C’était une vision qu’elle n’aimait pas voir chez lui. C’était… Effrayant sur les bords. Et surtout triste.
« Je vous en conjure, Sieur Balthial… Réfléchissez bien. Si vous quittez Ran, pensez-vous que ce royaume vous acceptera de nouveau ? Vous qui êtes dans l’armée… Cela ne voudrait pas dire que vous êtes un déserteur ? Je ne sais pas comment fonctionne la politique de votre pays, mais… »Mila avait les yeux humides. Elle tenta de le cacher.
« Je ne veux pas gâcher votre vie. J’ai parlé sur le coup de la colère, moi aussi. En vous demandant de m’accompagner. Alors… Vous comprenez là où je veux en venir. » Puis le regard bleuté de la jeune femme tomba sur le bras meurtri de son ami. Elle serra les dents. Ce n’était pas particulièrement la vision du liquide vermeil qui lui faisait mal. Mais plutôt le fait de savoir que l’homme était blessé par sa faute, et uniquement la sienne.
« Avant tout, tenez. » Elle fouilla dans son sac avant d’en ressortir un mouchoir brodé. Dans un geste doux, l’érudite appliqua ensuite le tissu sur la plaie, grimaçant au passage.
« Ne vous en faites pas pour ce mouchoir, ce n’est qu’un morceau de tissu… Avec lui, le saignement devrait se stopper. Je ne supporte pas de vous voir saigner… » La suite de la conversation était ensuite plus calme, et prévisible. La Bleuette réprima des larmes pour la dernière fois, sentant un peu de courage lui revenir. Il faisait nuit à présent, mais il y avait encore de quoi voir devant soi. Cela dit, le temps courrait et il ne les attendait pas.
« Allons-y, mon ami. Je- » La belle chancela l’espace d’un battement de cœur. Sa tête lui faisait vraiment du mal et son ventre la faisait souffrir également. Toute cette situation était irréelle pour elle, et pesante.
« Aah… Ne vous en faites pas, je peux marcher. Continuons, le temps presse… » Supprimant l’inquiétude de Balthial de son esprit, la jeune femme ne lui laissa pas le temps d’offrir une aide quelconque. Elle se débrouillerait seule pour rentrer à l’auberge, elle n’avait pas besoin d’une épaule pour la soutenir. N’est-ce-pas… ?
FIN