orvus s’excusa suite à une révérence des plus agréables. Elle le laissa traverser le palais, restant à sa place jusqu’à ce qu’elle le voie quitter la cour, sortant ainsi de son domaine d’influence. Aussitôt, le palais lâcha un souffle, comme s’il avait retenu sa respiration pendant tout ce temps. Les zarbis sortirent des murs, formant des rondes autour des tours et dans les couloirs. Quelques servant poussèrent des cris de surprises et quelques assiettes tombèrent parterre.

La figure sombre du fils d’Eddar aurait presque pu se fondre dans les ombres si l’orgueil de sa famille ne lui faisait pas ainsi bomber le torse avec fierté. Il exsudait une aura d’assurant, un charisme propre aux Eddaryons qui attirait bien des regards. Avait-il seulement conscience de la force de sa démarche ? Sakai, comme Kuni était habitée de famille nobles dont les racines remontaient aux grands héros de la guerre d’il y a cent ans et alimentaient une suffisance de soi et la croyance absurde que le monde leur appartenait. Les Valmar avaient été de ceux-là, de pitoyables excuses d’hommes qui vivaient dans l’ombre d’une époque révolue, qui ne leur appartenait même pas. Sakai se portait mieux depuis leur disparition. Ça avait été comme soigner une vilaine blessure purulente. Malheureusement, Valmar n’avait pas été la seule maison qui faisait saigner la nation violette. Bientôt, cependant, les autres suivraient son exemple.

Bravoure termina sa coupe. Les pâtisseries avaient été délaissées. La confiture dégoulinait lentement sur l’assiette. Elle les écarta, sortant un petit carnet où elle écrivit quelques notes sur son entretient avec le garçon. Pour ne pas oublier, mais aussi pour faire parvenir un rapport à Romarin le plus tôt possible. Elle allait devoir faire quelques modifications sur sa résidence à Kuni et prévenir Gerveaux de ne pas le garer à l’œil. Corvus était trop perspicace pour ne pas remarquer le manège. A la place, elle pouvait placer sous les lattes un éclat de pierre provenant du château pour que les zarbis puissent être connectés au lieu. Rien de bien dramatique, leur perception serait très limitée mais dans le cas extrême où l’affaire tournait affreusement mal, elle serait avertie.

La Chef de Sakai décida de se lever pour rejoindre la cuisine. Elle croisa Sindri dans les couloirs qui lui adressa un regard curieux qu’elle ignora. Elle manqua de se faire percuter par un jeune page qui déboula de la pièce à toute vitesse. Il s’excusa sans la reconnaître, filant comme un éclair son zigzaton sur les talons. La vielle dame pinça ses lèvres mais ne dit rien, entrant la pièce pleine de vie d’où provenait une odeur alléchante. Il lui semblait qu’il y avait toujours quelque chose qui cuisait dans ces fourneaux. Elle déposa le plat contenant les pâtisseries sur une table vide.

« Vous n’avez pas faim ? Il faut manger vous savez, vous n’avez que la peau sur les os ! » s’exclama l’une des cuisinières.

« Vous radotez Babd. » sourit la chef.

« Je radoterais moins si vous preniez plus soin de vous ! Un coup de vent et pouf ! Vous vous envolez ! Qu'est-ce qu'on fera sans chef ? »

« Vous en élirez un autre, comme il est coutume. » répondit-elle. « Mais, j'apprécierais néanmoins que vous ne m'enterriez pas trop vite. A vous entendre on croirait que j'ai un pied dans la tombe. »

« Oh, je vous assure que c'est moi qui vous mettrait dedans si vous ne finissez pas vos assiettes. » plaisanta la cuisinière.

La Dame rigola en traversant la pièce, saluant chacun des cuisiniez présents. Elle sortit par l’arrière porte emportant avec elle un citron qu’on lui avait mis dans les mains sur le chemin. L’arrière-cour du château était elle aussi pleine de vie. Bravoure se glissa sous les arches laissant la structure la camoufler. Elle retrouva sa porte dérobée qui donnait auparavant un accès direct à sa tour. S’engouffrant dans les marches elle referma la porte derrière elle, restant silencieuse quelques secondes avant de se glisser sous l’escalier, où se trouvait l’un des nombreux passages dérobés du palais. Celui là menait dans une chambre de l’aile gauche qui était elle-même reliée à une cavité dans le mur. Cette cavité était à peine éclairée à la bougie, aucune fenêtre ou ouverture ne pouvait suggérer son existence.

Bravoure déposa son carnet sur le bureau encombré. Quel qu’un y avait laissé une note. L’un des Etourmis de Romarin était revenu de Vénovos pour l’y déposer, c’était plus sauf que de se rencontrer en personne. Le message était minimalistes quelques symboles évocateurs. Un ramoloss surmonté d’une couronne en face d’un moumouton dont le visage avait été gribouillé. Mido avait envoyé son négociateur à Kuni et un premier contact avait été établi. Bravoure tira la chaise pour s’y asseoir. Les talents diplomatiques de la nation verte étaient effrayants.

Elle commença à rédiger la lettre pour romarin, trempant sa plume dans la chaire de l’agrume jaune. Le jus de citron tâcha un peu la feuille. Il semblait qu’elle n’écrivait rien et ne faisait que des points aléatoires sur la feuille. Cependant, mis à la lumière d’une bougie un code secret se révèlerait. Elle roula ensuite la feuille, ce soir, elle attacherait le parchemin à la patte d’un braisillon qui portera les nouvelles à Romarin. Elle s’attendait presque à la voir débouler avec sa gardevoir pour venir l’insulter en face à face. Bravoure ne prétendais jamais prendre les meilleures décisions. Seulement de faire choix là où d’autres laissaient languir le problème. Sakai était à l’aube d’un renouveau.