Le vent, semblable à une douce caresse, emporte les quelques pétales qui ne sont pas encore assimilés par la terre-mère. Ces délicates choses tourbillonnent un instant devant le regard perdu de l’Archevêque. Devant la tombe ne reste qu’un vestige se joignant aux ruines. Le bouquet n’est plus mais l’hommage demeure.

Galatea se redresse finalement, alertée par les cris des Pokémon. Son nouvel allié le Riolu semble prêt à tout pour prouver sa valeur. Sa posture experte trahie son type Combat. La souris électrique n’en est pas moins impressionnée. Toutefois, souiller les lieux serait un pêché auquel la douce femme ne veut pas prendre part.

« Mon vaillant ami. Je t’en prie, n’ouvre pas les hostilités. Ce lieu mérite tout le calme possible après notre altercation avec de pauvres gens. »

Le Riolu lève les yeux vers Galatea. Il la fixe un instant ; analysant probablement la situation. S’il se rend, qui sait ce que fera ce Pichu mal élevé… Le problème est pourtant aussi clair que de l’eau de roche. L’humaine aux longs cheveux n’acceptera pas qu’on lui désobéisse. Son aura puissante le prouve, car même si son cœur saigne, elle garde son sang-froid et sa détermination. Qualités qui attirent le jeune loup bleu.

Résolu, le Pokémon bat en retraire, imité par l’oiseau chromatique d’Elias. Le Pichu profite de cette occasion pour garder en hardiesse. La femelle bonde le torse de façon grotesque et l’effet en est presque comique. La Canarticho, elle, préfère s’en remettre aux humains. Combat ou non, elle ne souhaite pas participer aux affaires de la souris. Elle reste donc en retrait.

Galatea s’avance pour toiser le rejeton de la foudre. Ses éclairs sont un don d’Electhor. Il serait bien que le Pokémon apprenne à ne pas gâcher son potentiel à tout va.

« Enfant du tonnerre. Si tu souhaites te battre, cherche des adversaires au-delà de ces ruines. Il se peut que tu ne comprennes pas grand-chose aux coutumes des vivants, mais nous respectons nos morts. »

La Pichu penche la tête sur le côté ; ses étincelles n’existent plus. Elle est certainement en train d’essayer de comprendre le langage de la femme. Galatea pense souvent que les Pokémon la comprennent en un instant, puisqu’ils sont pour elle égaux aux Hommes.

Finalement, la souris n’est pas convaincue. La pluie est terminée et ne calmera pas les ardeurs de cette jeune créature jaune.

C’est un Arkéapti qui sort de nulle part qui décide de prendre la relève. Sigurd est aussi attiré par une aura minuscule mais spéciale. Son regard brillant comme le rubis tombe sur un autre Riolu apeuré. Il ne faut pas que la situation dérape. Le jeune mâle décide alors d’enjoindre son collègue à fuir plus loin.  

En un geste, Galatea semble arrêter le temps. Sous le regard imperturbable de son assistant.

« Enfants d’Arceus. Cette terre meurtrie ne doit pas être le théâtre de vos querelles. Je vous en conjure, allez-vous battre ailleurs. Dans le cas contraire, je me verrais dans l’obligation de vous donner la correction. »

Les yeux de l’Archevêque sont teintés d’une colère presque divine. Ils semblent lancer des éclairs comme le ferait un type Electrik. Son aura s’intensifie et perturbe Sigurd. Il tourne la tête pour voir que la femme ne plaisante pas.

Apparemment, l’intimidation fonctionne. Non seulement l’autre Riolu a fui, mais en plus, l’oiseau est parti lui-aussi. Il est bien sûr suivi de près par la Pichu qui ne désire qu’une chose : combattre et essayer ses attaques de foudre. Cette drôle d’humaine ne l’empêchera pas de réussir sa journée.

Galatea soupire doucement. La menace n’est pas la meilleure des solutions mais elle est parfois nécessaire. Au moins, les lieux sont préservés. Il est temps de partir afin de ne pas perturber davantage le silence ô combien important.

Mais les Pokémon sont toujours attirés lorsqu’il y a de l’agitation. C’est un fait immuable comme le temps qui s’écoule si Dialga le veut.

RP Solo

HRP:

Griller les ailes robustes de l'Arkéapti ne lui avait pas suffi: la petite Pichu avait pris goût à la victoire. Aussitôt après avoir foudroyé son volatile opposant, elle s'était mise en quête d'un nouvel ennemi, si possible plus grand et plus dur à cuire.

Elle fut servie.

Björn la regarda s'agiter devant lui avec défi, prête à décocher de nouvelles étincelles. Lorsque les premières l'atteignirent et se perdirent dans son ossature rocheuse, il ne prit même pas la peine de riposter.

- Tu sais... si tu continues, ça pourrait mal se passer.

- Meurs!

Après de nouveaux arcs électriques sans la moindre espèce de succès, la souricette agitait la queue, peut-être pour l'attendrir.

- Oh, comme c'est mignon, se moqua le Rhinocorne. Moi aussi je peux le faire, regarde.

Et il l'imita, remuant la sienne dans une grâce désabusée. La Pichu renouvela son geste, et le Rhinocorne également. Charlie observait ce concours de Mimi-queue avec un oeil amusé, en se demandant combien de temps cela durerait. Rhinocorne n'avait pas l'air décidé à empaler la rongeuse, et celle-ci n'était pas prête d'abandonner non plus.

- On n'a plus qu'à les laisser là. A tout à l'heure, Björn.

Elle s'enfonça donc un peu plus à travers les ruines, suivie de près par son Monorpale. C'était la première fois qu'elle revenait ici en sa présence, et cela n'était pas anodin.
A l'origine, le sabre était inanimé et appartenait à la famille d'Olrik, son ami défunt. Il était accroché au milieu de la grande salle de son donjon.

Flashback:

Depuis, Olrik avait disparu dans l'océan, et Charlie n'avait jamais nommée son épée. Quant au glaive pendu chez les Solstafir, il s'était éveillé sous la forme d'un Monorpale et la suivait jour et nuit, et c'était lui qu'elle nommait Olrik désormais. Cela lui avait causé bien des malheurs.

En revenant à Léros, elle espérait peut-être rendre la relique au champ de bataille auquel elle avait jadis appartenu. Le Monorpale trouverait peut-être d'autres sabres et boucliers avec lesquels jouer, et retrouver le repos éternel auquel les membres de la famille d'Olrik l'avaient peut-être soustrait en le ramassant...
Pour l'heure, Charlie n'avait croisé aucun autre vestige de guerre. Le lieu semblait gorgé de vie: les créatures des plaines s'en étaient emparés. Quant aux humains, il en venait parfois, comme ces trois malheureux, trempés jusqu’aux os, probablement noyés par l'averse qui venait d'avoir lieu.

- Vous... vous êtes avec elle ?

- Plaît-il ?

- Laissez tomber. Juste un conseil: ne piétinez pas les fleurs.

Elle les avait laissés s'écarter, en les observant d'un regard aussi méfiant que le leur. Ils étaient terrifiés, on aurait dit qu'ils avaient vu un Absol. Il n'en fallait pas plus pour piquer la curiosité de la chevalière.

Sans connaître l'endroit comme sa poche, Charlie savait apprécier le charme triste de ces lieux. Elle y traînait souvent avec Olrik de son vivant, et déjà à l'époque certains des locataires des ruines avaient su capter son attention.

- Oh, regarde Olrik! Un Canarticho. Comme au bon vieux temps... C'est pourtant un poireau. Pas un artichaut, un poireau! Drôle de nom que celui de cette bestiole, non?

Evidemment, le Monorpale n'eut aucune forme de réaction. Charlie s'en voulait d'être aussi futile. "Comme au bon vieux temps" ? Ses mots trahissaient sa naïveté. Pourquoi s'obstinait-elle à parler à ce bout de féraille hantée, comme si l'âme de son ami s'y était logée pour toujours? Si c'était vraiment le cas, pourquoi par Kyogre son fantôme n'avait-il pas plus de répondant?

En réalité, le spectre semblait moins préoccupé par la Canarticho que par le groupe d'humain qu'elle semblait suivre. Son oeil unique était braqué sur eux. En les remarquant, Charlie choisit d'en faire ses compagnons de fortune. Peut-être auraient-ils une compagnie plus plaisante que celle du sabre.

- Excusez mon ami, il est un peu gênant. Depuis qu'il est passé dans l'au-delà il a cette fâcheuse tendance à fixer les gens.

Ce n'est qu'en leur adressant la parole qu'elle remarqua leur allure, gorgée de dignité, teintée d'exotisme. Rien à voir avec les derniers visiteurs qu'elle avait croisés. Les couleurs du Noarfang étaient inhabituelles. A qui s'était-elle encore frottée?

Impossible de rester discrète. L'humaine ne m'avait pas loupée, et son jeune camarade bleuté non plus. Des Riolus comme lui, il y en avait des dizaines dans le périmètre, ces individus avaient un sens caché de sorte qu'il était impossible de leur échapper. Ma filature tombait à l'eau.

J'étais intriguée. Ce groupe était capable de miracles: couper à cette Pichu obstinée l'envie m'affronter, c'était un projet épineux, et je n'y serais jamais arrivée seule. Ce n'était pas la première fois que cette souricette me collait. J'avais eu le malheur de la croiser plusieurs fois, et à chaque occasion j'avais dû lutter pour éviter ses éclairs. Mon poireau était un excellent paratonnerre, mais entre lui et le sol, il y avait moi: je ne lâchai jamais mon arme, et cela m'avait coûté des plumes. Pichu était une plaie: une humaine capable de lui faire plier genou méritait nécessairement toute mon attention.

Pourtant la sienne me survola.

Où regarder? Les bipèdes se multipliaient comme du chiendent... Mais bien vite, il je remarquai une créature non bipède. Un glaive rouillé, comme il y en avait des dizaines d'un bout à l'autre des ruines, seulement celui-ci avait un œil. D'abord braqué sur l'humaine que je suivais, il finit par se poser sur mon petit corps que je ne savais plus où mettre. Quelle était cette créature? Comment devais-je me positionner face à elle? Son regard, c'était un défi.

La grande humaine derrière lui semblait effacée.

- Charlie Sulka Graenblar.

Que venait-elle de dire? Etait-ce un ordre? Le glaive volant allait-il m'embrocher? Comme j'étais trop tendue pour cancaner le moindre son, je me préparai simplement au combat, et à brandir mon poireau pour sauver mon existence.

- Me recueillir? Peut-être... je ne sais plus. C'est un peu le chaos.

Mélancolique, la dame d'or s'approcha de son glaive volant, comme si elle voulait le voir de plus près.

- Mon cœur est à Kuni: lorsque je viens ici, mes pensées vont naturellement à tous ceux qui ont péri dans la bataille de Léros. Mais je suis liée à cet endroit d'une autre manière... Mon ami et moi venions souvent ici: au-delà du devoir de mémoire la poésie étrange du lieu nous séduisait, et plus que d'écouter la voix des morts nous aimions y contempler le vivants, les nuages, le monde.
Accessoirement, sa famille y aurait également trouvé ce glaive un peu moche rongé par les âges.

Elle soupira.

- Depuis mon ami a rejoint les profondeurs de Kyogre, et son épée me hante jour et nuit. Je pensais pouvoir la rendre aux lieux, mais de toute évidence, ce n'est pas si simple... Vous devez me croire folle, pardonnez-moi.

Oh! Arrête de fixer ce Canarticho à la fin, Olrik! Je sais que tu les aimais bien aussi, mais laisse-le tranquille, le pauvre...

Je devais désormais encaisser le regard de l'épée et celui de sa propriétaire. Cela commençait à faire beaucoup... J'étais partagée entre brandir mon poireau pour les chasser ou courir me cacher. Ou me réfugier dans les jambes de la dame au Riolu? Du Riolu lui-même?

Mais l'autre m'interpella avant que je ne tente quoi que ce soit:

- Dis donc, toi... Tu n'espères quand même pas pouvoir lutter contre Olrik avec ton légume? Poireau ou artichaut, tu ne pourras rien contre lui, c'est un fantôme.

Elle me parlait sans agressivité, mais avec un panache qui me paralysa encore davantage.

- De toute manière ce n'est pas le lieu pour cela. Baisse ton arme sans délai.

J'avais beau ne pas avoir compris un traître mot, je ne pus que lui obéir. Mon poireau rejoignit le sol, mais je ne me détendis pas. C'eût été impossible tant que cette tension silencieuse avec le dénommé Olrik ne serait pas résolue. Une longue rivalité s'engageait entre lui et moi. Je ne le lâcherais pas.