l y a de nombreuses choses qui ne peuvent être contrôlées dans la vie. L’écoulement du temps, le cycle des étoiles et les rencontres en font partie. Ces dernières peuvent être enrichissantes, pleines de bonté et d’espoir ou au contraire enclencher le début d’une réaction en chaîne qui menant à un désastre. Bravoure aurait classé cette rencontre ci dans la dernière catégorie. Il n’y avait jamais rien de bon à tirer chez des braconniers. Ces êtres immondes qui chassent pour l’adrénaline et le son tintant des pièces. Le jeu et l’avarice. Ils représentaient le pire de l’humanité, cette facette qui détruit la vie et ne laisse que le sang et les larmes sur son chemin. D’une certaine manière, elle voyait en eux son écho.

Les trois hommes s’avançaient vers eux, leurs pas lourds et menaçant. La Dame savait la fuite futile et le combat perdu d’avance. Elle savait aussi pourquoi ils étaient là, ce qui les avaient attirés dans ce lieu désolé et grondant. Les migrations chromatiques étaient rares sur Ekoe, juste assez présentes pour alimenter le marché noir en ces créatures scintillantes et assouvir les désirs malsains de la haute société. Il n’était pas rare de voir un noble où deux en possession d’une telle bête. Les yeux terrifiés de la créature racontaient alors son histoire mais sans les faits, la loi ne pouvait que se taire et courber l’échine devant la couardise des hommes. On disait qu’il était impossible de mettre à terme le marché noir, cela n’empêchait pas les chefs d’essayer.

« Eh bien, qu’est-ce qu’on a là ? Une petite vieille avec son petit pokémon ? C’est dangereux par ici vous savez… » commença le premier, jouant avec la chaine à sa taille. « On dit que les petits trucs comme lui attirent les malheurs… »

Bravoure le toisa, gardant son sang-froid. Il y avait beaucoup trop en jeu pour qu’elle ne se risque à perdre la partie. Les braconniers fixaient Devoir, évidemment il était ce qu’il y avait de plus précieux ici. Si elle voulait s’assurer de la santé de Sindri ainsi que la sienne elle n’avait pas trop de choix.

« Nul besoin de jouer, je sais ce que vous êtes et ce que vous voulez. Prenez-le donc. »

Les trois hommes s’arrêtèrent brusquement, abasourdis. D’habitude on offrait plus de résistance. D’habitude mon pleurait, criait, marchandait. On finissait mort gisant dans une flaque de son propre sang aussi. Ils n’étaient pas capables de déterminer si l’absence de tout ce qui rendait leur chasse si amusante les ennuyait ou bien les réjouissait. Ils s’échangèrent des regards en biais. Bravoure poussa simplement Devoir dans leur direction. Le petit pokémon la regarda avec inquiétude, elle ne daigna même pas échanger un regard avec lui.

« Donc ? Vous le voulez ou non ? » continua-t-elle en haussant un sourcil.

Le plus gros des trois attrapa brusquement le petit pokémon sol par le bras, le tirant vers lui. Devoir faillit se faire arracher ce bras, ses jointures avaient été abimées avec l’eau. Le braconnier tâtonna le pokémon à la recherche d’imperfections. Il était sale, c’était une création plutôt récente mais qui avait été exposé aux éléments des geysers. La mousse recouvrait ses marques et les failles formaient des motifs sur son corps d’où s’échappaient une lumière verte presque fantomatique. Il attrapa brusquement le pied du pokémon, cherchant à trouver la marque de son créateur. Il n’y en avait aucune.

« C’est bien un chromatique. Il est en bon état et docile. C’est le pactole. » confirma-t-il à son chef.

L’homme hocha la tête. Ils avaient fait bonne chasse mais la vieille femme le mettait mal à l’aise. Tout cela était trop facile. En même temps, ce n’était pas comme si elle pouvait se défendre sans le garçon. Elle n’était après tout qu’un vieux machin un peu trop anguleux. Un sourire mauvais s’étira sur les traits du leader. Il fit signe à ses compagnons de partir, adressant lui-même un dernier signe de tête à la femme avant de lui tourner le dos. Bravoure pouvait entendre les pleurnichements de Devoir mais se résolut à garder la tête haute et ne pas regarder le pokémon.

Ce n’est que lors que les braconniers et leurs prises du jour disparurent dans la brume, à dos de leurs pokémons, qu’elle s’avançant pour se jeter presque sur Sindri, les mains tremblantes. Elle pouvait sentir les battements de son cœur. La seule blessure visible était le mauvais coup qu’il avait reçu sur la tête. Elle attrapa les captis ball à sa ceinture, comme elle l’avait supposé, les barbares étaient trop réjouis d’avoir trouvé un pokémon chromatique pour penser à faire les poches du duo. Immédiatement elle libéra Eldr et Hedda.

« Hedda veilles sur Sindri, que personne ne l’approche. Eldr, il faut que tu traques les vauriens qui viennent de partir. » ordonna-t-elle.

La trioxhydre poussa un rugissement furieux. Comment des humains osaient-ils blesser son dresseur ?! Si cela ne tenait qu’à elle, elle serait déjà dans les airs à déverser des torrents de flammes mais, les intentions de la Dame faisaient loi. L’arcanin quant à lui se mit à renifler le sol, cherchant à s’accrocher à l’odeur ténue des hommes. Malheureusement la brume des geysers commençait déjà à effacer les traces, seul restait cette horrible odeur de carcasse en décomposition. C’était mieux que rien. Il s’abaissa pour permettre à la Chef de monter sur son dos avant de s’élancer à toute allure.

Bravoure s’accrochait de son mieux aux poils du pokémon tigré. Elle se sentait glisser à chaque pas, sa raison lui hurlant qu’elle avait perdu l’esprit. Que comptait-elle faire seule face à trois de ces lascars ? Elle ne connaissait de l’art de la guerre que le poison et les coups fourrés. Il fallait qu’elle soit plus intelligente qu’eux, plus petite et fourbe. Au moins en attendant que Sindri se réveille et trouve un moyen de la rejoindre.

Elle sera les dents. D’où lui venait donc cet héroïsme insensé ? Pourquoi le destin d’une petite créature de terre lui important autant ? Son devoir était envers son peuple pas… Bravoure soupira, la détermination brûlant dans ses yeux. Qu’elle sotte elle avait été de s’attendrir. Pourtant la vérité était là, dans le nom même du pokémon. Elle lui courrait après parce que c’était son devoir. Celui de protéger ceux qui dépendaient d’elle, voilà le rôle d’un chef. Ô combien elle détestait ce fabuleux principe. Ce rôle aurait mieux vêtu Eladan ou même De Rosind au lieu d’elle qui ne connaissait que les ténèbres et la mort.

Elle fit ralentir l’arcanin. Le terrain devenait plus rocailleux, ils s’approchaient du canyon vers le nord si elle se rappelait correctement ses cartes. Les geysers dans ce coin là étaient présents mais plus rares. Les oreilles du pokémon feu s’agitaient, il pouvait entendre des voix. Bien, leur campement ne devait pas être très loin. En se rapprochant à pas feutrés, elle pouvait commencer à entendre des gémissements et cris apeurés de petits pokémons. Eldr se glissa derrière un renforcement. Bravoure descendit de son dos, glissant un coup d’œil furtif vers la caravane chargée de cages de toutes tailles.

Le campement des braconniers était dans une corniche ce qui leur permettait de se cacher des regards mais avait aussi l’utilité de ne laissait qu’une seule entrée. Impossible de se faire prendre en tenaille. Il y avait au centre les restes d’un feu autour duquel étaient délaissés des restes de repas. De là où elle était, elle pouvait distinguer de nombreuses fourrures pendant docilement comme si elles étaient affichées dans un marché. Elles appartenaient à des pokémons de toutes tailles némélios, arcanins, luxray et autres gros félins des savanes. Quelques défenses de donphan jonchaient le sol, négligemment abandonnées par terre. Non seulement ces hommes tuaient pour le plaisir mais en plus ils n’avaient aucun respect pour leur marchandise. La colère gronda en Bravoure comme un vent glacial.

Ô combien elle regrettait l’absence de ses gardes. Vengeance aurait été parfaite pour cette situation. Elle allait devoir réfléchir autrement. Elle retourna à l’abri derrière les rochers. Elle avait pu entendre les cris des pokémons mais à cette distance elle n’était pas capable de les différencier dans les cages. Impossible de savoir si Devoir était avec eux. Distraitement elle caressa la fourrure d’Eldr avant de retourner à son post d’observation, il fallait juste qu’elle force un peu pour voir les pokémons pris au piège.

ne chartor et une rattata avaient été balancés outrageusement dans une cage trop étroite pour leur permettre le moindre mouvement. Ils grognaient et mâchouillaient leurs barreaux sans succès, gaspillant de la bave et de l’énergie. Lorsqu’ils faisaient trop de bruit un des hommes se levait pour aller frapper la cage. Trois coups sonores qui faisaient vibrer toute la charrette et pleurer les prisonniers, puis il repartait. L’habitude marquait ses gestes. Il ne vérifiait même plus l’état des pokémons. Tant qu’ils pouvaient râler c’était qu’ils étaient en vie, et s’ils ne l’étaient plus… la fourrure se vendait bien dans le royaume du nord et la viande pouvait toujours servir dans la ville basse de Chevropolis.

Les yeux de Bravoure s’arrêtèrent sur une crevasse qu’elle n’aurait peut-être pas remarqué si l’un des trois hommes n’était pas entré dedans. Il tenait dans sa main un anneau de clefs mais ne les avait plus en ressortant. Il devait y avoir d’autres cages à l’intérieur. D’autres prisons de fer. L’idée même des barreaux la faisait trembler. Cela éveillait en elle des souvenirs qu’elle avait cru enterré par les années. Sa rationalité entière lui hurlait de ne pas agir, de faire demi-tour et de prévenir une patrouille ranine mais, son cœur lui hurlait autrement. Elle se refusait à laisser des innocents pourrir dans des chaines.

« Eldr, je veux que tu grognes, aboies, que tu te fasses grand et fort mais par-dessus tout que tu les éloignes tous. » ordonna-t-elle au pokémon.

L’arcanin hocha la tête avant de filer à toute vitesse. Loyal à en mourir. Ses grondements raisonnaient dans la vallée. Elle vit les trois hommes hésiter, regarder leurs armes puis les geysers. Bravoure serra les dents. Ils devaient être en train d’évaluer les gains d’une dernière chasse. Ce n’était pas assez pour les attirer. Le pokémon feu dû venir à la même conclusion car un hurlement retentit. Suivit de peu par un torrent de flammes. Eldr sauta sur un rocher, s’affichant à la vue de tous, ses poils ondulant sous les braises. Une bête comme aucune autre, au pelage si épais et soyeux qu’il rendait les peaux des braconniers bien pitoyables en comparaison. C’était le coup de pouce nécessaire pour les faire bouger. Aucun reseller n’aurait pu résister, Sindri prenait énormément soin de son pokémon.

Dans un ensemble coordonné, les hommes s’emparèrent de leurs armes pour chasser la bête. Piques, filets et arcs. Soit ils n’avaient pas peur d’abimer la marchandise, soit ils étaient confiants en leurs capacités. Les deux n’annonçaient rien de bon. Les hommes invoquèrent leurs montures d’un mouvement souple, trois zebiltz fulminant et frappant du sabot avec fougue. Les pauvres pokémons étaient harnachés de pics et de cuir, ils étaient terrifiants. Rapidement, les braconniers enfourchèrent leurs montures et déboulèrent avec fracas dans la vaste étendue des geysers. La Dame n’avait plus qu’à espérer qu’Eldr soit plus rapide que les pokémons électriques.

Elle attendit qu’ils disparaissent dans un nuage de poussière pour se faufiler discrètement dans le campement. L’endroit empestait la mort et la sueur. Les pokémons dans les cages s’agitèrent à sa vue, elle leur fit signe de se taire. Il y avait des signes dans le campement qui indiquait la présence d’un quatrième membre, elle ne pouvait pas se permettre de l’alerter. L’état des pokémons était déplorable, certains tournaient en rond, ayant vraisemblablement perdu l’esprit, d’autres se rongeait la peau ou restaient amorphes dans un coin. Il y avait aussi ceux qui continuaient de se battre, la rage au ventre, mais pour combien de temps encore ? Ces hommes n’avaient aucun respect pour la vie. La Dame pouvait sentir son sang bouillonner et sa vision de teinter de rouge.

Bravoure accéléra le pas en passant devant les pokémons prisonniers, elle avait besoin des clefs. Maintenant ! Elle dû fouiller dans les affaires des braconniers, aussi puantes que le reste de camp. De sa main droite elle couvrait son nez et sa bouche, régulant sa respiration alarmée. Elle avait cet automatisme de se retourner au moindre bruit et se figer devant les ombres mouvantes des herbes. Il ne fallait pas que les gardes la trouvent entrain de voler des rations. Elle se figea. Non, pas de gardes, pas de ration. Juste des braconniers et des clefs. Elle n’était pas Ardath la pitoyable mais Bravoure la Chef. Elle ne connaissait ni la peur, ni le doute.

« Mon nom est Bravoure et je tuerais Kennet Valmar. » souffla-t-elle entre ses dents.

La phrase resta en suspend quelques instants dans l’air. La Dame retrouva immédiatement sa froide assurance. Les mots magiques avaient été prononcés. Elle finit par trouver les satanées clefs perdues au fond d’une poche. Elle commençait à redouter que les braconniers ne soient partis avec. La Dame s’empressa de retourner auprès des pokémons, prête à les libérer avant de se retenir, la clef en main. Tous n’étaient pas en état de sortir, et les relâcher risquait de causer une panique qui ne manquerait pas d’alerter les vauriens. Il fallait qu’elle se ressaisisse. Ce n’était pas elle qui était derrière les barreaux. Il n’y avait pas besoin de se presser, aucune vie n’était en danger pour le moment.

« Bientôt. Je vous le promets, restez sages. »

Elle s’éloigna à reculons, le regard perdu dans les yeux vides d’un ratentif. Elle voulait ces braconniers vivants pour avoir le plaisir de voir leur tête rouler sous le coup de son bourreau. Leur mort ne serait que justice. Pour l’instant, il lui restait encore un lieu à explorer. Elle n’avait toujours pas trouvé Devoir et elle ne partirait pas sans elle.

Bravoure traversa le camp pour jeter un coup d’œil à la fissure. Elle était faite de telle manière que, selon l’endroit où on se positionnait, elle pouvait paraître invisible. Un trompe œil naturel, parfait pour cacher les marchandises les plus précieuses. La Dame se glissa à l’intérieur, immédiatement sa respiration s’accéléra à un rythme alarmant. Ô combien elle haïssait les endroits clos et étroits. Heureusement cette fois-ci elle était préparée psychologiquement. Ses pas raisonnaient dans le boyau malgré les précautions qu’elle prenait. Elle arrivait à peine à distinguer le sol maintenant qu’elle avait passé l’entrée, la seule chose qui la poussait à continuer était cette forte odeur rance qui caractérisait si bien l’enfer des prisons. Si le gringolem était quelque part, c’était bien ici au cœur des ténèbres.

Son pied cogna contre quelque chose qui émit un son plaintif mais étouffé. Elle posa doucement sa main dessus, vérifiant à tâtons si elle n’avait pas cogné un pokémon ou pire. Bravoure soupira de soulagement, c’était juste une caisse. Se glissant sur le côté elle découvrit une vacillante source de lumière, une unique torche plantée dans le sol. Son regard fut malgré lui attiré par les traces de pas sur le sol sableux et le trousseau de clef suspendu à la paroi. L’espèce de cave était remplie de boites d’où on pouvait entendre des grattements alarmés, toutes n’étaient pas fermées par des verrous, certaines avaient juste une grosse pierre dessus. Le plus doucement, Bravoure souleva le couvercle de l’une d’entre elles.

eu. Fut la première pensée qui traversa l’esprit de Bravoure. En un instant, mu par la volonté de vivre, ses muscles se crispèrent, la tirant vers l’arrière et loin des flammes dévorantes. La Dame s’effondra sur le sol, haletante. Une vilaine odeur de brûlé envahissait la pièce, lui rappelant l’attaque du Grand Conseil. Bravoure fut soudainement prise de tremblement. Elle se leva d’un bon, s’éloignant de la caisse enflammée avec précipitation. Deux pokémons feu glapissaient à l’intérieur et les flammes commençaient à s’attaquer aux autres caisses de bois. Un homme sortit de l’ombre, ennuyé par le vacarme. Vêtu entièrement de noir, le visage couvert d’un crâne de bête. Il avait sa petite réputation au sein du marché noir, son groupe était petit mais efficace et s’ils ne ramenaient pas les plus grosses prises, ni les meilleurs, la cruauté de ses méthodes avait fait écho. Nullement inquiété par les flammes et les cris d’agonie, l’homme s’avança.

« Qui aurait crû trouver ici notre très chère Dame Bresingra ? » susurra-t-il.

« N’allez-vous donc pas éteindre le feu ? » répliqua-t-elle nullement impressionnée par sa soudaine apparition, la main sur le torse pour forcer sa respiration malgré la fumée bouillonnante.

La Dame de Sakai ne pouvait le voir sourire mais le corps entier de l’homme traduisait son amusement malsain. Il se balançait doucement, jouant avec la fumée, le visage tourné vers son torse. Il savait pour ses poumons. Non, il avait su qu’elle était là dès le moment où elle avait mis les pieds dans la grotte. Elle avait agi sans réfléchir et voilà qu’elle se retrouvait à la merci du loup.

« Pourquoi ferais-je ça ? Oh, vous avez un peu de mal à respirer peut-être ? Voulez-vous que je vous aide ? » proposa-t-il de sa voix mielleuse.

Un kabutops apparu à ses côtés, éteignant prestement les flammes avec un jet d’eau. Il fit claquer ses mandibules. Clic, clac. Les dernières braises donnaient des reflets inquiétant à ses lames. La menace était sans équivoque. Les pokémons enchaînés se turent. Elle était faite comme un rattata. Impossible cependant de reculer. Il y avait trop en jeu pour qu’elle perde face. De son regard, Bravoure fusilla l’homme masqué, restant fermement en position même lorsqu’il s’avança à une distance inconfortable. Il la surpassait de plusieurs têtes mais plus impressionnant encore était la largeur de sa carrure. Elle se sentait étouffer.

« M’aider ? Ce serait avec plaisir, vous pourriez commencer par ouvrir quelques-unes de ces caisses. Cela facilitera la tâche des soldats ranins. » assura-t-elle sans sourciller.

Il se figea quelques secondes. La jugeant de ses petits yeux sombres. Il devait être habitué aux bravades ou aux pleurs. L’indolence de la femme le prenait au dépourvut presque autant que ses mots. Mais il était un homme aux nombreux talents et savoir improviser faisait partie de ceux-là. L’homme misa sur le bluff.

« Je doutes fortement de la présence de quelconques soldats… »

Il semblait considérer quoi faire avec elle, la tête penchée sur le côté. Demander une rançon pourrait s’avérer lucratif mais dangereux et la laisser partir était hors de question. Bravoure semblait être arrivée à la même conclusion que lui. Ciras Verron avait déjà mystérieusement disparu et il y avait eu aussi de nombreuses tentatives d’assassinat sur les chefs, il était, après tout normal, que l’une d’entre-elle finisse par réussir. La mort, était la plus simple des réponses.

Un bruit sourd se fit entendre. Il venait d’une boîte dans le fond. Le kabutops s’y dirigea pour mettre un terme au raffut. Un poing d’argile fit voler en éclat le reste de la boite. Aussitôt, un cri perçant retentit dans la pièce, tel le hurlement d’une femme en détresse. Banshee, souffla son esprit. Devoir, répondit son cœur. Étonnement.

« Qu’est-ce que c’est que cette mer- ! » commença le braconnier en se retournant.

Il fut coupé court par Bravoure qui détalait dans le sens opposé. Elle se glissa derrière une cage, son cœur battant à tout rompre et la honte rosissant ses joues. Ce n’était pas un comportement digne d’une chef. Sa respiration était saccadée et voilà que, sous l’effet du stresse il semblait, elle se mettait à souffler cette brume toxique. Elle pouvait déjà commencer à sentir sa tête tourner.

« Allons, votre seigneurie… Vous auriez pu me dire de vous étiez amatrice de cache-cache… »

Elle se glissa un peu plus loin. Navigant à la faible lumière de la torche, lorsque soudainement celle-ci disparu. Noir total. Bravoure se figea. Pourquoi avoir éteint la lumière ? Les kabutops n’étaient pas des animaux nocturnes et elle ne l’avait pas entendu invoquer un autre pokémon. Pourquoi se mettre volontairement en désavantage ? Trop de questions et pas assez de temps pour y répondre. Elle décida qu’avancer à tâtons entre les caisses était mieux que de rester en place. Il fallait qu’elle rejoigne la sortie. Elle pouvait entendre le craquement des pas assurés de l’homme masqué, à peine couverts par les gémissements provenant des boîtes.

« Vous voyez votre seigneurie, il se trouve que je suis excellent à ce jeu… Chasser est ma passion et vous faites malheureusement une bien piètre proie. »

Sa voix se rapprochait inexorablement. Il avançait tranquillement avec la certitude de la trouver, d’une manière ou d’une autre. Bravoure sursauta en entendant un crissement sonore. Chitine contre roche, des pas lents, le son de mandibules qui claquent. Clic, clic, clac. Le kabutops aussi avait rejoint la traque. La Chef de Sakai sentit son espoir vaciller et l’inquiétude la gagner. Qu’était-il advenu de Devoir ?

Elle buta contre quelque chose. Le son résonna dans la grotte. Clic, clic, clic, clac ! Elle s’accroupit, cherchant frénétiquement quelque chose sur le sol. Ses doigts rencontrent quelque chose d’allongé, froid et visqueux par endroit, elle le jeta le plus loin possible. Le son ricocha, suivit de près par les pas pressés de l’homme masqué et le claquement frénétique du pokémon roche. Elle rampa dans la direction opposée.

« Daaame Bresingra ~ Vous n’avez pas bien compris le principe du jeu, il me semble. Vous ne devez pas faire de bruit, sinon je vais vous a-ttra-per ~ »

Bravoure réfugia dans un angle, tremblante, les yeux écarquillés à la recherche de la moindre source de lumière. Clic, clic, clac. Le kabutops était là. Clac, clic, clic. Il tenait dans l’une de ses pattes la tête d’un petit gringolem aux yeux verts. La Chef plaqua précipitamment une main devant sa bouche, complètement immobile. Sous la faible lueur des yeux du pokémon chromatique, elle pouvait voir l’ombre grandissante du prédateur. Clac, clic, clac, clic. Les secondes passèrent comme des heures. Elle pouvait sentir la sueur glisser dans son dos. Clic, clic. Le kabutops reparti. Bravoure sentit toute la tension de ses muscles se relâcher. Elle souffla doucement.

« Bouh ! »

La Chef de Sakai fit quelque chose de peu typique et de pas franchement glorieux. Elle hurla, donna un coup dans le vide et frappa par miracle ce qui lui semblait être le braconnier masqué. L’homme était en train de s’étrangler, prit d’une soudaine toux qui le laissa avec la respiration sifflante. Bravoure ne réfléchit pas plus et le poussa. Courant dans le noir et se cognant contre les caisses. Maudissant son orgueil qui l’avait encouragée à aller sauver les pokémons sans aide. Elle était épuisée, essoufflée comme elle ne l’avait jamais été. Ses pas étaient lourds et gauches, c’était son corps entier qui luttait pour s’effondrer.

Elle trébucha sur une planche de bois, tombant dans une caisse laissée ouverte. Le pokémon à l’intérieur glapit de douleur et surprise. Frénétiquement, Bravoure se roula en boule pour disparaitre à l’intérieur de la caisse, serrant le pokémon contre elle. A l’instar de l’humaine, la petite créature tremblait de tous ses membres. La Dame tenta de réguler sa respiration et de reprendre contenance. Devoir n’était pas morte, c’était un esprit voué à la servitude après avoir été enfermé dans un corps d’argile. Elle-même n’était pas encore morte. Elle avait survécu à pire. Elle survivrait. Elle était brave. Elle avait promis aux pokémons qu’elle les libèrerait.

Un triple rugissement retentit, faisant trembler les murs et crier les pokémons. Hedda et Sindri. Elle n’était plus seule. Oh, ce stupide garçon avait pris son temps pour venir. Quel piètre garde il faisait. Le pire du lot sans aucun doute. Le sourire de la Chef était large et elle se laissa même aller à un soupir soulagé.

« Je vous avait dit que la garde arrivait. »

« Et je vous avais dit que je vous trouverais. »

La lame de l’homme brilla au-dessus d’elle. D’un même geste, la Dame tendit sa main. Pour se protéger, pour arrêter le coup. Le long de son bras des gouttelettes se formèrent, remontant jusqu’au bout de ses ongles où elles explosèrent en de petits éclats toxiques. Un gaz translucide, à peine visible en plein jour et définitivement imperceptible dans le noir. Un gaz acide, juste assez toxique pour provoquer une toux et irriter les yeux. Une dernière distraction, un coup de maître qui lui fit gagner quelques précieuses secondes alors qu’une nouvelle fois, l’homme masqué se retrouvait bloqué dans son geste par une quinte de toux. Un autre cri aigu retentit. Un écho spectral du premier qui avait fait sursauter le kabutops. Suffisamment brusque et violent pour faire sursauter une nouvelle fois l’homme.

Sindri jaillit de la l’entrée. Un bras entièrement enflammé et l’autre serrant sa hache. Il se jeta sur l’homme masqué qui évita prestement les coups furieux du garçon. Eldr sauta à la suite de son maître, les crocs dévoilés dans un hurlement qui fit trembler tous les pokémons présents. Le kaputops lâcha sa proie, détalant à toute vitesse par une sortie dérobée. Suivit de peu par l’homme masqué qui se retourna une dernière fois vers le garçon et sa Dame.

« Bravoure Bresingra, je ne vous oublierais pas. Notre chasse n’est pas terminée... »

Sindri lança sa hache qui manqua l’homme de peu et rebondit sur la roche. Le silence revint brusquement dans la salle. Coupé seulement par le crépitement des flammes et les mouvements paniqués des pokémons dans les caisses. Le rouquin se laissa tomber à côté de sa Chef, le teint rouge, les yeux agars.

« J’ai- J’ai pas réussi à- »

« Shhh, Sindri. C’est fini. Tout va bien. Je vais bien. » le rassura-t-elle.

Elle tendit sa main pour repousser une mèche de son front moite. Le garçon la regardait avec des yeux larges. Il était tout aussi essoufflé et effrayé qu’elle.

« Ce serait quand même préférable que tu éteignes ton feu- » commença Bravoure.

« Oh ! Oui, excusez-moi. »

La salle se retrouva brusquement dans le noir.

« …Après avoir rallumé les torches. » termina-t-elle.

Pourtant aucun des deux ne bougea. Elle dans sa caisse, un pokémon logé dans les bras. Lui affalé à côté, la manche fumante. Il leur était impossible d’expliquer leur fatigue et le mal de crâne naissant. Tout comme il leur était impossible d’expliquer leur survie. Mais ils étaient bel et bien en vie, et les pokémons allaient pouvoir être libérés. Elle ne prenait pas que des mauvaises décisions.

Eldr ramena les morceaux luisants de Devoir. Une à une la petite créature spectrale se reconstruit. Son corps avait été fissuré, entaillé par endroit, on pouvait voir cette lumière verte éthérée qui s’échappait des craquelures et beignait les alentours d’une lueur spectrale. Elle cligna des yeux. Faisant des petits bruits curieux, son bras se tendit doucement vers Bravoure, comme si elle avait peur du rejet. La Dame glissa ses doigts dans les siens.

« Je suis fière de toi, Devoir. » murmura-t-elle.

Le pokémon l’avait entendue. Sa lumière clignota joyeusement. La Dame ne l’avait pas abandonnée. Elle était venue la chercher. Elle était venue pour elle.

ravoure cligna des yeux en grognant. Elle porta la main à sa tête, c’était comme si une dizaine de donphan dansaient sur son crâne, le martelant de leurs pieds sans aucune pensée pour sa santé. Les fourbes. Elle se redressa, le monde autour d’elle avait repris ses couleurs. Un feu crépitait non loin d’elle, elle y reconnu là, la patte de Sindri. Un galekid somnolait à côté d’elle. A par lui, les pokémons étaient toujours enfermés dans leurs cages mais de l’eau et des vivres avaient été apportés. Tous la fixaient de leurs larges yeux comme s’il lui avait poussé un troisième bras. La Dame retira la cape qui avait été enroulé autour d’elle, c’était celle de son garde.

« Sindri ? » appela-t-elle.

Aussitôt une tête apparue dans son champ de vision. Pas celle qu’elle espérait cependant. La petite Devoir galopa jusqu’à elle, heureuse comme tout. Elle ralentit en s’approchant pour la prendre délicatement dans ses bras. On aurait dit qu’elle avait peur de la casser en deux. Ce qui soyons francs, n’était pas loin d’arriver, le pokémon sol avait de la poigne. La vieille dame tapota doucement la créature animée, ne sachant pas trop où se mettre. La culpabilité de l’avoir laissée de faire emporter assombrissait ces retrouvailles. Elle savait qu’elle avait fait le bon choix parce qu’au final, tout s’était résolu mais elle avait dû trahir sa confiance pour ce faire. Un sourire amer de dessina sur ses traits, elle avait passé l’âge de développer une morale.

« Où est Sindri ? » demanda-t-elle après un moment.

Le petit pokémon d’argile lui pointa la sortie de la grotte. La Dame décida de se lever, il y eu un petit cri surpris à ses côtés. Sursautant, la vielle dame tourna la tête pour découvrir une petite galekid dont l’armure de platine était ravagée de balafres s’accrocher à sa robe. La petite bestiole avait le nez en l’air et les crocs dévoilés, elle tournait la tête dans tous les sens en feulant comme un chacripan. Visiblement apeurée par le brusque mouvement qui l’avait sortie de son sommeil.

« Je ne fais que me lever. »

Le son de la voix dû lui faire peur parce qu’elle tourna brusquement son attention vers Bravoure, la chargeant de sa tête. Devoir l’attrapa au vol. Les petites pattes de la créature métallique battaient furieusement dans l’air. La Dame avait pu voir de petits pokémons teigneux mais celui là prenait le gros lot. Vraiment ? L’attaquer ? Elle ? La Chef de Sakai se releva en époussetant sa robe, lançant un regard noir vers la bestiole aux yeux rouges. Un autre chromatique. Les braconniers avaient bien chassé, malheureusement. Devoir se mis à parler à la galekid pour l’apaiser. Ce qui attira l’attention de la Dame sur les yeux fixes de la créature qui s’apaisait graduellement. Elle passa doucement la main devant le visage de la galekid maintenant silencieuse. Ses pupilles ne suivirent pas sa main.

« Elle est aveugle ? » demanda-t-elle au pokémon sol.

La gringolem hocha la tête, lui tendant la petite créature chromatique pour qu’elle la prenne dans ses bras.

« Je crois que tu ne réalise pas combien ça pèse… » refusa-t-elle.

La déception des deux pokémons était palpable. Bravoure s’agenouilla à leur niveau, se risquant à caresser la face ravagée de la galekid. Elle porterait ces marques à vie. Tout comme elle-même devait porter les siennes.

« Tu as été courageuse. On ne les laissera plus mettre la main sur toi, ni aucun des autres. » lui assura-t-elle.

Bravoure ne pouvait lui promettre le bonheur, ni la santé mais, elle ne pouvait s’assurer que de sa sécurité. Il se trouvait d’ailleurs, qu’elle connaissait la personne idéale pour s’occuper de ces pauvres victimes, Eladan ne refuserait jamais l’asile à une créature blessée. La galekid fixait son regard vide vers elle, elle ne regardait pas dans la bonne direction mais ses yeux rouges restaient glauques. Bravoure ne pouvait pas critiquer, elle n’était pas mieux lotie. Elle laissa la grotte pour rejoindre Sindri. Se refusant à baisser le regard vers les pokémons prisonniers de peur de perdre la raison et de les relâcher. Chaque chose en son temps, ils allaient avoir besoin de soins avant. Devoir la suivit avec la galekid non loin derrière. Elle suivait le son des pas du pokémon devant elle.

Bravoure s’arrêta quelques secondes, éblouie par le soleil brûlant de Ran. Ce dernier avait bien baissé depuis qu’elle s’était retrouvée sous son regard blanc. Combien d’heures était-elle restée inconsciente ? Pire encore, quelle en avait été la cause ? Cette abrupte fatigue l’inquiétait, son corps était-il entrain de la lâcher pour de bon ?

« Dame Bravoure, vous êtes réveillée ! J’ai eu peur. » s’exclama le rouquin en trottinant à sa rencontre.

Il avait retiré son amure et était couvert de foin. De la paille s’accrochait sur ses vêtements, bottes et partout où ça pouvait se glisser. Elle aurait presque pu le prendre pour un fermier. Bravoure retira une longue tige de ses cheveux lorsqu’il se rapprocha, elle remarqua par la même occasion la croûte de sang séché sur son front mais ne commenta pas dessus. Il était entrain de nourrir les pokémons avant qu’elle ne l’interrompe. Hedda se tenait un peu plus loin, ses six ailes écartées pour essayer d’évacuer la chaleur. Il avait certainement dû faire des allers-retours dans la savane. De ce qu’elle pouvait voir le rouquin avait même déplacé les cages pour qu’elles soient à l’ombre des rochers. Il avait été bien actif.

« Tout va bien, c’était juste passager. » lui répondit-elle.

« Vous méritez bien votre nom ! » sourit-il.

« Pardon ? »

« Si foncer tête baissée dans un repère de braconniers pour libérer les pokémons n’est pas brave alors rien ne l’est ! » répondit-il avec entrain avant de baisser les yeux, la honte marquée sur le visage. « Je voulais aussi m’excuser pour mon incompétence. »

Elle le regarda incrédule. C’était certainement la chose la plus stupide qu’elle ait faite et lui la félicitait comme si c’était un quelconque exploit ? Bravoure secoua la tête, faisant signe au garçon d’oublier toute cette histoire. Ce qu’il s’empressa de faire en changeant de sujet.

« Oh, je vois que vous avez rencontré la petit galekid ! Elle est adorable n’est-ce pas ? Vous l’aviez dans les bras et elle refusait de vous quitter. » commenta-t-il avec un sourire. « Je crois par contre qu’elle est aveugle. » ajouta-t-il dans un murmure.

Bravoure baissa les yeux vers la petite galekid qui fixait un point devant elle, la tête penchée sur le côté. Elle écoutait leur conversation avec attention.

« Tu as pu prévenir Ran ? »

« Oui, des soldats ont déjà emmené les braconniers, ils vont revenir avec des charrettes et de gros porteurs pour les pokémons. Ils ne devraient pas tarder je pense. »

Bravoure hocha la tête. Satisfaite. C’était pour le mieux, elle ne pouvait rien faire de plus pour ces pauvres créatures. Le climat hivernal de Sakai ne leur aurait pas convenu, le long trajet les aurait achevé.

« Je vais t’aider avec les pokémons. »

Malgré les protestations du garçon qui insistait sur le fait qu’elle doive se reposer, la Dame retroussa ses manches pour s’atteler à la tâche. Suivie des deux petits pokémons chromatiques, elle repassa dans chacune des caches, retirant les fécès et autres pourritures. Sindri faisait des grimaces derrière elle. Pauvre garçon ne savait pas ce que c’était que de vivre dans sa crasse. Le travail ingrat apaisait son esprit et ses doutes. Ce qu’elle faisait était bon. Devoir et la galekid transportaient les sacs souillés pour les enterrer plus loin. Le pokémon acier avançait avec assurance et refusait toute aide et pitié de la part des autres. Néanmoins Bravoure pouvait la voir tressaillir lorsque Sindri faisait trop de bruit où lorsque l’un des pokémons se mettait à paniquer. Force et courage n’étaient que des illusions construites sur des mensonges, combien de temps cette façade tiendrait-elle ?

De ses doigts, elle caressait doucement le pelage d’un manglouton à travers les barreaux de sa cage. Il perdait ses poils par endroit, laissant des plaques de peau rouge et pustuleuse. Les braconniers opéraient ici depuis des semaines il semblait, de toute évidence aujourd’hui devait être leur dernière traque. C’était un coup de chance que Bravoure soit tombée sur eux. Il était déjà possible de voir ceux qui ne survivraient pas. Certaines blessures étaient trop infectées, d’autres avaient complètement perdu l’esprit. Il y avait aussi ceux qui resteraient marqués à jamais. Derrière son masque d’indifférence le cœur de Bravoure se tordait. Elle ne voulait que fuir loin d’ici, loin de ses problèmes. Elle ne le faisait pas, pour la simple raison que ces pokémons ne le pouvaient pas.

« Ma Dame, les ranins sont là. » l’informa doucement Sindri.

Une petite garnison se tenait non loin. Des hommes et femmes au regard durci par la colère et à la gorge serrée de pitié. Certains étaient jeunes, trop jeune peut-être pour voir ça. Les larmes dans leurs yeux en témoignaient ainsi. Elle les jaugea tous. Les trouva tous inapte à la tâche. Il lui fallait des personnes de confiance, elle voulait être sûre que les pokémons seraient entre de bonnes mains. Qu’ils partent et aillent chercher Eladan elle-même. Elle ne pouvait pas leur confier une telle responsabilité. Son cœur hurlait et se débattait comme un beau diable. Cela faisait des années qu’elle l’avait enchaîné à sa raison. Aujourd’hui ne serait pas différent. Les ranins repartiraient avec les pokémons.

« Ils vont avoir besoin de soin urgemment. » indiqua-t-elle en se décalant pour leur laisser accès aux cages.

Les soldats s’empressèrent d’aller rejoindre les pokémons, leur murmurant des mots de réconfort. Ils faisaient des détours pour l’éviter elle. Certainement à cause de son regard sombre et son visage grave. D’aucun pouvait affirmer que cette rencontre avait été une victoire face aux braconniers. Bravoure ne pouvait sentir que le gout amer de la défaite. Le chef de la bande s’était échappé et pourrait continuer impunément ses crimes. Elle aurait la tête de cet homme, d’une manière ou d’une autre.

Une femme s’approcha de Bravoure, visiblement inquiète. Elle jetait des coups d’œil en direction de ses collègues qui faisaient semblant de ne rien voir. Toutes les cages avaient été montées sur les charrettes et sanglées pour plus de sécurité. Les bourrins étaient prêts à partir, stables malgré les cris paniqués des pokémons blessés. Certains des prisonniers avaient dû être endormis pour le trajet.

« Euh, votre seigneurie. Nous comme prêts à partir mais… que fait-on de celui-là ? » demanda finalement la soldate en désignant la galekid assise aux pieds de Bravoure.

La Chef était en conflit avec elle-même, ou tout du moins elle voulait l’être. Elle n’avait pas besoin de tel sentimentalisme. Un simple regard à Devoir puis au pokémon l’avaient cependant décidée, ce avant même que la question ne se pose.

« Elle restera avec moi, soldat. Sauf si vous doutez de mes capacités à en prendre soin ? »

« Non, non ! Absolument pas ! » s’empressa de répondre la jeune femme. « Nous allons donc partir. Un rapport vous sera envoyé au Palais Obscur pour vous confirmer notre arrivée et la sentence de ces malfrats. »

Bravoure hocha la tête. Les laissant quitter ce lieu maudit avec leur cargaison. Le soleil ranin se couchait et avec lui la chaleur de la journée. La Chef regarda un instant ses mains souillées. Elle devait avoir l’air d’une pouilleuse avec son chignon défait et ses vêtements crassés. Pathétique. La Dame prit une inspiration avant de se tourner vers Sindri. Il avait déjà sellé Hedda et la regardait avec une admiration nouvelle. Le coup qu’il avait reçu sur la tête devait être pire que ce qu’elle pensait.

« Tu es sûr que tu peux chevaucher jusqu’à Enogen ? »

« Oui, ma Dame. »

« Si tu tombes en plein ciel, je ne te rattraperais pas. »

Il lui sourit avant de laisser glisser son regard vers les deux pokémons chromatique qui attendaient la suite avec inquiétude. Devoir se tordait les mains. Bravoure regardait la galekid. Si petite, si fragile et pourtant si forte. Il lui fallait un nom qui reflète un avenir meilleur. Quelque chose dans lequel elle puisse puiser la force de continuer.

« Prospérité. » appela Bravoure. « C’est ce que je te souhaite et je veux que ton nom le reflète, pour que jamais tu ne l’oublies. »

Elle s’agenouilla doucement aux côtés de la galekid, caressant doucement son crâne rayé. Elle sourit ensuite à Devoir. Le nom de la gringolem était pour rappeler à Bravoure qui possédait son cœur et sa loyauté. Son peuple. Ses pokémons. Elle se redressa. Faisant signe à Sindri qu’il était temps de partir.