PHARAOH LEAP CREATES

PHARAOH LEAP CREATES

« Tu me crois si je te dis que même avec tout ce que j’ai voyagé entre les quatre pays, je ne suis jamais venu ici ?
- GLING ! »

Donc Bernadette me croyait. Et bien évidemment, c’était la stricte vérité : c’était la première fois que je venais dans cette croisée, au centre du continent. Pourquoi l’avais-évité jusqu’ici ? Ce n’était pas vraiment par peur ou par mépris, mais cette zone était simplement connue pour être moins peuplée que le reste du continent. Et un lieu moins peuplé était de facto moins intéressant pour un barde. Malgré tout, cette zone était idéale pour qui voulait passer d’un pays à son antipode, et c’était justement mon cas.

A voir la réaction d’Aria et de Jean-René devant cette magnifique plaine avec sa cascade qui produisait un bruit presque artistique, je ne regrettai pas mon choix. Comme j’aurais pu l’anticiper, Aria commença à pousser de petits grognements en harmonie avec le fracas pourtant brutal, mettant une nouvelle fois en évidence son sens inné du rythme. Quant à Jean-René, il s’assit simplement devant la cascade et la regarda fixement, complètement captivé par le spectacle de la chute d’eau.

Seule Bernadette était restée avec moi, un peu en retrait, sans doute parce qu’elle n’appréciait pas que ses bruits de grelots ne soient pas audibles par-dessus le vacarme de l’eau, là où Aria se fichait complètement de ne pas être écoutée.

Je me perdis moi aussi quelques temps dans la contemplation de l’eau, jusqu’à ce que quelques bruits de Bernadette me tirent de mes pensées aquatiques. Ou plus exactement, ce n’étaient pas des bruits mais des notes. Et la Korillon n’était pas la seule à jouer apparemment : d’autres bruits, plus secs, qui semblaient sortir d’un instrument à corde, lui répondaient.

Intrigué, je demandais à ma partenaire :

« Tu sais qui joue avec toi ? »
Tout en continuant de jouer du grelot, elle me fit « non » de la tête.
« Ca te dirait pas qu’on aille voir ? »

Un hochement me répondit. Bernadette était aussi curieuse de nature que moi. Mais j’avais tout de même quelques scrupules à tirer Jean-René et Aria de leurs activités simplement pour satisfaire mes désirs. Aussi, j’allais rapidement les trouver et leur dit :

« Bernadette et moi on va faire un petit tour ! Vous pouvez venir ou rester vous amuser ici mais soyez sages d’accord ? »

Un Gruik et un hochement de tête mes répondirent, et je revins seul là où jouait toujours Bernadette. Nous ne serions donc que deux sur ce coup-là. Patiemment, en nous guidant à l’oreille, nous nous approchâmes de plus en plus prêt de l’endroit d’où semblaient sortir les notes : un petit buisson !

« Ca c’est trop petit pour qu’un humain puisse s’y cacher. Tu penses que c’est quel Pokémon qui joue ? Un Mélokrik ? »

Bernadette ne me répondit pas, trop occupée à entretenir son dialogue musical avec son mystérieux partenaire. Un instant, je restais pensif devant ce buisson. Il ne bloquait pas complètement la voie pourtant, mais je me demandais comment procéder : si j’avançais tout de go vers lui, le Pokémon musicien risquait de prendre peur et de s’enfuir. Le mieux était donc peut-être de m’annoncer pour tester sa réaction :

« Ca te dirait de jouer avec moi aussi ? »

Bien évidemment, poser cette question à un Pokémon sauvage inconnu n’entraînait que rarement une réponse, compréhensible de surcroît, mais je voulais surtout que l’inconnu sache que j’étais là et qu’il n’y avait pas que Bernadette dans les environs.

Aucun son spécifique ne me répondit mais la musique avec Bernadette continua. Je pris donc cette absence de réaction pour un oui. Qui ne dit mot consent…

J’avançais donc à pas de Grahyena vers le buisson et écartait délicatement ses feuilles pour apercevoir le Pokémon… Mais je ne trouvais rien. Il j’y avait rien ni personne là-dedans ! La seule chose de notable était une grosse branche au centre du buisson… A laquelle était accrochée un gros fil d’araignée quasiment invisible. Pas d’erreur, le son venait de là, le fil vibrait au rythme de la mélodie ! Et de ce que je pouvais voir, le fil était relié à un arbre non loin, mais sa piste se perdait ensuite dans les branchages et se poursuivait d’arbre en arbre, trop loin pour que je puisse en deviner l’origine d’ici.

Donc le Pokémon -ou l’humain, car c’en était peut-être un du coup – qui jouait avec Bernadette avait créé tout un instrument de musique à cordes géant. Impressionnant ! Mais il ne devait pas être si loin que ça puisqu’il était assez prêt pour entendre ce que jouait Bernadette !

En regardant bien, je pourrais peut-être l’apercevoir… Main visière devant les yeux, je commençai par regarder en direction du soleil. Puisque je n’avais vu personne jusqu’ici, le musicien mystère se cachait peut-être dans la lumière ! Je vis alors deux hommes non loin, dont l’un des deux semblait s’éloigner en direction de la sortie de la zone Safari ! L’un d’entre eux était peut-être mon musicien ?

Toujours flanqué de Bernadette qui continuait sa mélopée, je m’approchai de l’homme en question qui était roux, borgne et un peu plus jeune que moi. Mais surtout, il ne semblait tenir aucune corde dans ses mains qui serait reliée à un instrument. Fausse piste… A moins que son instrument ne se joue pas avec les mains ? Il n’y avait qu’une façon d’en être sûr :

« Bonjour ! Vous êtes musicien ? C’est vous qui jouez des cordes avec ma Korillon ? Je vous présente Bernadette ! Et moi c’est Silver, enchanté ! »

Bernadette remua joyeusement ses bras et ses pieds pour saluer l’inconnu, tout en continuant de jouer avec l’inconnu aux cordes, car leur morceau à deux n’avait pas cessé.

Alors comme ça elle voulait jouer ? Eh bien allons-y ! Et les deux autres aussi d’ailleurs ! Et vu comment Arsène m’avait malencontreusement atteint, il ne semblait pas vouloir se limiter à l’araignée ! Eh bien soit ! Qu’il en soit ainsi ! Je plongeai donc sous l’eau quelques secondes fin d’éviter les tirs avant de ressortir en bondissant pour envoyer un maximum d’eau possible le plus haut possible pour atteindre notre adversaire suspendue !

Cette dernière finit arrosée mais ne se laissa pas faire pour autant : tandis que la gerbe d’eau l’atteignait, elle cracha sa sécrétion droit sur mes cheveux mais cela ne m’empêcha pas de retomber le plus lourdement possible dans l’eau, propulsant ainsi une grosse vague droit sur Arsène. Moi aussi je pouvais toucher malencontreusement mes « alliés » !

Bien évidemment, cela entraîna des représailles et le jeu continua encore plusieurs minutes jusqu’à ce qu’un jet d’eau parti je ne sais d’où percuta non pas l’araignée mais un des fils auxquels elle était attachée. Aussitôt, un drôle de son mélodieux se fit entendre. Pas d’erreur, c’était la même gamme de son que tout à l’heure !

« Alors c’était toi la musicienne ! »

Ravie, la Mimigal hocha la tête… Et me cracha son fil dans mes cheveux ! Mais à partir de là, la bataille se déroula sans moi. J’étais déjà absorbé par la suite des événements… Après tout, j’avais déjà promis une chanson… Et même si mes Pokémon étaient occupés, j’avais ici une partenaire impromptue pour un petit duo ! Je lançai donc à l'arachnéïde :

« Hé, toi ! Ca te dirait qu’on fasse une petite chanson tous les deux ? Sur une histoire d’araignée ? »

Visiblement intriguée, le Pokémon descendit jusqu’à hauteur de mes yeux. Elle aussi semblait avoir oublié la bataille en cours. J’avertis alors Arsène et Kira de notre départ :

« Excusez-moi, je vais sortir de l’eau, cette Mimigal et moi allons vous préparer la chanson que je vous avais promise ! »

Bon, j’étais presque complètement à poil mais heureusement, il y avait un buisson non loin où j’avais laissé mes habits. Je me sèche rapidement avec la serviette / couverture de mon sac puis je me rhabille et j’étends la couverture sur une branche non loin. Puis je rentre en grande discussion avec l’araignée - qui m'avait suivi - qui a regagné son instrument de musique : toute une toile musicale. Selon le segment qu’elle pince avec ses pattes, le son produit est plus ou moins mélodieux, ce qui me permet de savoir si elle apprécie ou non mes suggestions. Finalement, nous tombons d’accord sur l’histoire d’une araignée qui escalade vaillamment  un arbre géant. Puis, alors que je chuchote les paroles qui me vienne à l’esprit, mon acolyte joue très doucement la musique qui s’accorde selon elle à mes mots. Cette phase de préparation nous prend un certain temps mais ce n’est pas forcément plus mal : j’avais cru comprendre que Arsène et Kira se connaissaient depuis un moment, du coup mon retrait allait leur permettre d’échanger tranquillement entre eux sans avoir à subir la présence d’un inconnu qui ne connaissait rien à leur passé !

Pris d'une inspiration, je demandai à ma partenaire à huit pattes :

"En attendant, ça te dirait que je te capture ?"

En réponse, l'araignée claque joyeusement des mandibules tandis que je lui lance ma ball.

[Chanson au prochain tour, petit teaser^^]