C’était le jeu du Miaouss et du Rattata. Jeanne se faufilait dans le camp faisait a peu près tout ce qu’il y avait à faire et filait sans que Laurel ne puisse l’apercevoir. C’était comme vivre avec un fantôme. Et c’était horripilant. C’était aussi étrangement attentionné mais, la Ranine avait un peu de mal à se l’avouer.

Tous les matins elle se levait pour voir le petit mot écrit que lui tendait Tourmaline avec les instructions pour la journée dessus. La première matinée où elle avait eu la note Laurel avait pesté. Quand elle avait dit « Tu peux venir » elle disait littéralement tu peux voyager AVEC moi. Et non pas Arceus sait où. Elle avait bien passé deux heures à la chercher avant de se résigner. C’était sa vie maintenant. Certain avaient des pokémons gardiens comme Victini, Celebi ou autre, d’autres avaient une Jeanne gardienne. C’était presque plus intimidant mais certainement plus sévère.

Au bout d’un certain temps elle avait arrêter de vouloir attraper Jeanne. Elle s’était dit que ce n’était pas plus mal, elle aurait ainsi le temps de réaliser son projet et mettre un peu de tri dans ses idées. Laurel détester rester seule trop longtemps avec elle-même, elle savait qu’elle finissait toujours comme une loque à se demander le sens de la vie. Heureusement, entre la marche et les entraînements elle avait de quoi s’occuper. Elle suivait à la lettre toutes les instructions de son mentor. Si elle pouvait pas lui parler, elle voulait au moins lui montrer qu’elle n’était pas fâchée au point de la bouder complètement.

Les repas le soir étaient agréable quoi qu’un peu tendus. Le temps qu’elle ne pouvait pas passer avec Jeanne, elle se passait avec ses pokémons quand ils étaient là. Elle avait fait une balle avec des vêtements déchirés qu’elle lançait au deux petits quadrupèdes pour qu’ils puissent courir après. La joaillière était toujours impressionnée de voir les courbettes et galipettes que faisait l’Evoli poour attraper la balle. Elle aurait juste aimé avoir quelqu’un avec qui partager son rire.

Avant de se coucher, elle avait prit l’habitude d’allumer un autre feu, loin du campement. Elle se disait que peut-être Jeanne pourrait l’utiliser pour la nuit. Une fois son feu allumé, elle s’installait au sien pour commencer à façonner son bijou. Ça prenait plus de temps que normal sans sa prothèse pour l’aider. Heureusement elle avait un petit groupe de pokémons qui de temps en temps voulaient bien l’aider à tenir tel ou tel morceau. Lentement mais sûrement, l’objet prenait forme. Elle n’était pas bien sûre encore si elle voulait en faire une broche ou un collier. Elle se disait que le premier pouvait avec un côté un peu impersonnel tandis que l’autre risquait de se coincer quelque part pendant un entraînement ou un combat. Il lui restait encore quelques nuits pour choisir et si l’un n’allait pas, elle pourrait toujours, donné un peu temps, le transformer en l’autre.

Malta avait repris ses habitudes de disparaître en pleine journée pour revenir plus tard couverte de poussière. Laurel devait passer de longues heures à frotter ses écailles pour enlever la crasse qui s’y était glissé. Ce n’était pas aussi agréable que brosser Tourmaline mais tout aussi important. Elle se coupait souvent les doigts sur la peau rugueuse du dragon ce qui l’obligeait à porter des pansements. Laurel trouvait qu’elle avait l’air un peu idiote avec, surtout que la seule fois où elle avait porté autant de bandages aux doigts c’était lorsqu’elle avait tenté de caresser un Bourrinos récalcitrant.

La Ranine profitait des midis pour montrer les parchemins à son pokémon et essayer de comprendre les instructions de ceux-ci. Malta semblait étrangement mieux comprendre les images que Laurel qui n’arrivait même pas à trouver la tête du pokémon représenté. Les petites séances avaient été récompensées parce que Malta était venue un soir en crachant un torrent de flammes pour allumer le feu. Alors, oui, elle avait réussit à allumer un feu. Mais elle avait surtout faillit brûler la moitié des provisions, trois pokémons sauvages et déclencher un incendie. La joaillière s’était alors demandé si c’était une bonne idée de lui avait appris une telle-attaque.

Au fur et à mesure qu’ils se rapprochaient des marais, Laurel pouvait de temps en temps apercevoir Jeanne. Parfois elle voyait une ombre solitaire loin devant elle sur la route, qui semblait refléter chacun de ses mouvements. D’autres fois c’était sa voix qui raisonner lors des entraînements. Dans ses moments là, plus que la honte de mal faire le geste, c’était le soulagement d’entendre la femme parler qui lui faisait redoubler d’effort. Laurel ne s’était jamais sentie aussi seule. Parfois, lorsqu’elle voulait se rassurer et vérifier qu’elle soit bien là, elle prenait une mauvaise position et, ineffablement elle entendait un cri qui sortait des buissons, où de l’arbre là-bas qui lui disait de rectifier sa posture. Alors, elle le faisait, le cœur battant à toute vitesse un léger sourire aux lèvres.

Souvent elle était moins patiente et essayait de sprinter à toute vitesse pour rattraper Jeanne. Juste pour lui demander de partager un verre au coin du feu. Pour lui proposer de porter quelque chose ou même de s’excuser. Elle ne la rattrapait jamais. Souvent cela la faisait paniquer. Elle avait rapidement réalisé que ce n’était non pas les flammes qui l’avaient marqué durant l’attaque fatidique mais la course poursuite après la chef de Ran. Cela n’aidait pas que Jeanne était aussi blonde qu’elle et portait le même nom. Pourtant, malgré les cauchemars que cela suscitait la nuit, elle continuait de courir après son mentor. Hurlant  des « Attends-moi ! », « Tu veux pas ralentir ? j’en peux plus ! » ou encore « Cinq minutes j’ai une crampe ! ».

Finalement, le groupe était arrivé dans les marais et Laurel avait immédiatement détesté l’endroit. Ça puait, c’était humide y avait des flaques d’eau et des bêbêtes qui voulaient la manger. C’était définitivement ni sexy, ni cool et elle priait Dame Fortune pour réussir à trouver le Métamorph le plus tôt possible. De temps en temps elle se demandait ce qu’elle ferait après. Jeanne n’avait aucune obligation de la suivre et elle se retrouverait sans mentor et sans amie. Retourner à Ran était une possibilité mais, pour y faire quoi ? Passer l’entretient pour s’inscrire comme soldat ? Cette pensée au lieu de l’exciter l’angoissait.

Au final elle avait décidé que si elle devait quitter Jeanne après les marais qu’elle devait au moins la voir une dernière fois. Qu’elle devait au moins la remercier pour tout. Et s’excuser. S’excuser de l’avoir jugée aussi rapidement alors qu’elle n’avait pas changé. Elle avait aimé Vagabonde sans rien connaître d’elle. Et maintenant qu’elle avait appris qu’elle était Croc-Bleu, qu’est-ce que ça changeait ? Elle restait la même personne qu’elle avait été durant ce long voyage. Une femme d’exception qui faisait fondre son cœur. Et dont l’absence était une torture.

Laurel avait envoyé Malta un peu plus loin dans les marais, pour qu’elle fasse du bruit, tant pour attirer l’attention de Jeanne que celle des pokémons. Elle avait fait exprès de se lever plus tôt pour essayer de surprendre Jeanne. L’idée était simple, elle allait s’éloigner un peu du camp, se trouver un arbre derrière lequel se cacher et attendre là jusqu’à ce que son mentor apparaisse. C’était une excellente idée.

C’était une terrible idée. La pire idée au monde. Les marais n’étaient pas seulement faits de boue mais de mini points d’eau vraiment plus profond que ce dont ils avaient l’air et Laurel s’était enfoncée dans l’un d’eux. Elle essaya de se calmer. C’était juste de l’eau. De l’eau gluante couverte de ce truc vert flottant dont elle ne pouvait voir le fond. Elle avait glissé en essayant de passer derrière cet arbre avec les grosses racines qui sortaient de terre et maintenant elle était coincée. Comme une idiote elle avait laissé ses armes au campement et elle n’arrivait pas à atteindre une liane qui pendait. Malta était Arceus sait où et Jeanne était comme à son habitude hors de portée.

« Okay. Ça va aller Laurel, tu peux le faire. Juste un pas en avant. » tentait-elle de se rassurer.

Elle leva difficilement une jambe dans cette eau qui lui arrivait jusqu’à la poitrine pour la poser devant elle. Juste au moment où un truc gluant passait. Laurel hurla et bascula en arrière.

« AAAAH ! »

Elle n’arrivait plus à trouver le sol. Peut importe à quel point elle tendait ses jambes vers le fond, le sol semblait encore plus loin. Elle sentait la panique monter alors qu’elle passait sous l’eau, battant désespérément de son bras et ses jambes pour garder la tête à la surface. Elle vit vaguement Tourmaline venir vers le camp.

« JEANNE !! MALTA ! AU SEC- » hurla-t-elle avant d’avaler de l’eau.

Elle ne savait pas nager. Et elle avait très très peur.

L’eau vaseuse rentrait dans sa bouche étouffant ses poumons en feu qui luttaient pour respirer. Elle se débattait, essayait de hurler de peur, de désespoir mais les sons restaient prisonnier de l’eau. Chaque coup de bras semblaient l’emmener dans de plus grands tourments. Elle était à bout de forces. La boue pesait lourd sur sa poitrine, ses bras vicieux la traînant vers le fond. Elle lutte. Mais plus pour longtemps. Ses poumons crient à l’agonie. Elle va mourir, elle ne veut pas mourir. Où est Jeanne ?

La première aide arrive, un vaillant Evoli. Elle tente de la soutenir mais Laurel bouge trop. Elle croit que le pokémon veut la tirer vers le fond. Un deuxième plonge pour la soutenir. Trop d’eau. Partout de l’eau, de la boue. Dans sa gorge, ses narines, ses yeux. Elle ne peut pas respirer, elle ne peut pas voir. Tout semble si lourd. Son corps, la boue, ses paupières. Il fait froid aussi. Si froid et si lourd. Elle est fatiguée, ses mouvements ralentissant. Elle continue de lutter, elle ne veut pas couler. Bouge. BOUGE !

Elle pense à Jeanne. Elle avait juste voulu la voir encore une fois. Juste encore une fois. Entendre son rire et graver son sourire sur ses lèvres.

Elle ne peut plus retenir sa respiration. Elle inspire. L’air ne vient pas. Seule la boue s’engouffre et envahit ses poumons. Laurel à un dernier soubresaut avant de sombrer.

Tout lui semble noir et froid. Elle entend vaguement une voix. Le sol est dur et inhospitalier. Son corps lutte face à la vase, il tente la chasser mais quelque chose l’en empêche. Puis le barrage cède. D’un vif sursaut il rejette la boue. Laurel roule sur le côté tremblante, vomissant le reste d’eau. Elle reprend ses esprits lentement. D’abord c’est l’ouïe. Les cris enjoués des pokémons. Puis elle voit l’herbe, le sol. Son cher sol. On la soulève et des bras l’enserrent. Laurel se laisse faire, glissant sa tête dans le cou de sa sauveuse.

Sa respiration est lourde et forcée. Comme si elle cherchait à compenser le manque d’air. Elle ne veut pas d’eau. Elle a eu trop d’eau. Elle veut juste Jeanne. Rester là, dans ses bras, loin du monde. Loin de la civilisation et ses lois. Loin de ce qui a été.

« Merci. » souffla-t-elle. « Je t’ai attrapé. Ça compte, non ? » demanda-t-elle la voix rauque.

Elle pose sa tête sur l’épaule de la femme pour pouvoir la regarder. Il lui semblait que ça faisait une éternité qu’elle n’avait pas pu la voir, sentir ses mains sur sa peau.

« T’as de la boue partout. » elle fronce les sourcils « C’est un peu à cause de moi. J’ai été idiote. »

Laurel ne parlait pas vraiment de son plan. Elle pensait plutôt à cette conversation fatidique. Elle ne savait pas si elle avait eu la bonne réaction. Si elle avait fait le bon choix. Elle savait juste qu’elle avait dit des choses, pensé des des choses qu’elle regrettait. Ça signifiait que c’était le mauvais choix, non ?

Elle laissa Jeanne l’aider à se lever. Elle eu un sourire pour les pokémons, ces héros. Elle les aurait tous embrassé si elle n’avait pas si froid que ses dents claquaient involontairement entre-elles. Elle se laissa donc guider jusqu’au feu, s’accrochant au pantalon de Jeanne lorsque ce celle-ci l’aida à s’asseoir. Avec son regard, elle la suppliait de ne pas partir.

« Tu peux rester ? » demanda-t-elle. « J’ai pas pu te le dire mais… j’aime beaucoup ton prénom. Et ta compagnie. Et ton sourire. Tu m’as manqué Jeanne, je suis désolée. »

Malta déboula sur le camp, alertée par le cri du Goupix. Elle lance à peine un regard vers Jeanne et Laurel, il y a un danger plus important au quel il fallait se soucier. Malta rugit, se positionnant entre les humaines et les nouveaux arrivants. Un groupe de pokémon venait d’apparaître l’air sinistre.

Il y avait quatre pokémon au total. Un Smogo menaçant qui relâchait une épaisse fumée jaunâtre qui glissait sur le sol en direction du groupe, la végétation se tordait là où la fumée entrait en contact avec elle. Bain de Smog. Le dragon grognait ne bougeant pas de sa place malgré le nuage mortel qui avançait vers elle, elle défendrait le groupe quoi qu’il en coûte. Un Anchwatt à ses côté semblait parcouru d’étincelles qui crépitaient dans l’air, tétanisant les muscles de ceux qui s'approchaient trop prêt. Cage-Eclair. C’était une combinaison mortelle. Le pokémon électrique paralysait ses proies pendant que l’autre les laissait mourir à petit feu avec son poison. Le Smogo glapît des ordres en direction de deux autres pokémons qui se tenaient en retrait. Un truc rose visqueux et une Grenousse. Les deux pokémons s’étaient mis en hauteur pour éviter l’attaque combinée des deux monstres.

« Bonne nouvelle je crois qu’il y a un Métamorph, mauvaise nouvelle on va mourir. » lâcha Laurel.

La fumée toxique était sur eux et obéissant aux ordres du Smogo, les deux autres pokémons eau s’étaient mis à bombarder le groupe avec des Vibraquas du haut de leur perchoir. Les balles d’eau explosaient sur le sol en des gerbes scintillantes. L’une des attaques vient percuter Malta de plein fouet, la laissant légèrement sonnée pendant que le gaz la laissait affaiblie. Laurel attrapa son marteau de guerre qui traînait un peu plus loin.

« Malta, il faut les faire descendre de là ! » cria-t-elle.

La Carmache secoua la tête pour essayer de reprendre ses esprits. C’était une bataille contre le temps. Le plus longtemps ils restaient là, le plus risqué leur situation devenait. Malta réussit à se concentrer suffisamment pour cracher une gerbe de flammes en direction de l’arbre. Elle avait largement manqué les pokémons mais maintenant le tronc prenait feu, les forçant à sauter dans l’eau en bas pour ne pas rester coincés. Laurel toussa à cause du gaz toxique.

« Jeanne qu'est-ce qu'on fait ? » demanda-t-elle légèrement paniquée.

Laurel écouta les instructions de Jeanne. Le fait que son mentor se retrouve seule face à deux pokémons l’inquiétait mais s’il y avait bien quelqu’un qui pouvait gérer la situation c’était elle. La Ranine rejoint son pokémon qui tanguait légèrement et avait du mal à rester droit. Elle prit posa sa main sur sa tête, la forçant à la fixer.

« Malta. Malta écoute moi, c’est Laurel. Il faut que tu reprennes tes esprits. Concentre-toi sur ma voix. » commanda-t-elle.

Elle pouvait voir que son pokémon louchait légèrement et clignait des yeux souvent comme si la lumière était trop vive. Le coup l’avait plus sonné que ce qu’elle avait cru. La joaillière continua de parler à sa Carmache en lançant des coups d’yeux inquiets vers la zone de combat. Les deux oiseaux avaient évolués en de beaux spécimens colorés et prêts à en découdre. Tout comme Malta ils avaient aussi gagné en force. Ce qui la surprit plus cependant fut le petit Nival, toujours discret et silencieux. Voilà qu’il sautait dans la mêlée pour déverser un souffle de flamm- quoi ?

« C’est quoi ce truc ? Il est cassé ? Pourquoi il crache des flocons ? »

Laurel ne savait pas bien comment fonctionnait les pokémons mais elle était quasiment certaine que les Goupix, de part leur type feu ne pouvaient pas utiliser d’attaque glace. Étaient-ce les gaz et sa noyade qui lui faisaient voir des choses ? Pas le temps de s’attarder dessus, le deuxième Vibraqua avait été de trop pour Invar qui se retrouvait chancelant. Ils étaient entrain de perdre du terrain.

« Malta par tous les dieux, sors de ta transe ! » implora Laurel.

De l’autre côté, Jeanne était au prise avec le Smogo. Toute sa grâce et son agilité étaient mises à l’épreuve face à ces deux adversaires. Laurel poussa un cri lorsque la sardine lança son attaque électrique mais sa mentor la dévia aisément, perdant en même temps son arme. La joaillière sentit son cœur battre à toute vitesse. Le cimeterre de Jeanne gouttait légèrement et la plaie béante du Smogo témoignait de son efficacité. Peut-être qu’ils avaient une chance de gagner malgré tout.

Pourtant, alors que Laurel reprenait espoir, elle vit Jeanne tituber. Le pokémon poison avait ce sourire malsain sur le visage mais restait à une distance sécuritaire de la lame de la guerrière. Il fallut quelques secondes à la Ranine pour comprendre ce qu’il s’était passé. Poison.

« Non ! » souffla Laurel avec horreur.

Elle resserra sa prise sur son marteau et chargea avec un cri de rage. Le premier coup, trop large, loupa le pokémon électrique. Le revers s’abattit avec force sur la boule violette. Crac ! Laurel y avait mis tout son élan. Ses pieds éteint fermement ancrés dans le sol, ses bras rigides et ses muscles tendus. Elle avait travaillé ce coup pendant des heures. A frapper le bois, la roche, l’air sous le regard vigilant de Jeanne. Il était temps de mettre en pratique ce qu'elle avait appris. Pieds, hanche, lève, tourne, frappe. Crac. Encore. Pieds, hanche, lève, tourne, frappe. Loupé. L’électricité gronde. Ses crépitements lui donne la chair de poule et font hérisser ses cheveux. Le coup arrive et elle ne pourra pas l’éviter.

Une masse aquatique s’abattit avec force sur la sardine la clouant au sol. La queue de Malta claqua comme un fouet. Elle planta ses griffes dans le sol et poussa un rugissement tonitruant. La sardine électrique paniqua et par réflexe ou par peur elle balança une décharge électrique qui éblouit les alentours. Étincelle. Laurel encaissa le choc en grognant. Elle avait le gout du fer dans la bouche. Son nez s'était mis à saigner mais elle resta campée ferme sur ses appuis. La foudre glissa sur les écailles de Malta l’enveloppant de petit éclats sans la blesser. Le dragon ouvrit grand sa gueule. BAM ! BAM ! BAM ! Trois boule de feu violettes jaillirent de sa gorge pour se fracasser les unes après les autres sur la bestiole coincée par terre.  

Laurel eu juste le temps de lever son marteau avant d’être percutée de plein fouet par le Smogo. Elle atterrit sur ses fesses, l’arme ayant encaissé le gros du choc. Jeanne était empoisonnée, elle n’avait pas de temps à perdre. Elle se releva le plus rapidement possible. Cherchant frénétiquement des yeux son amie qui avait peut être été touchée par l’attaque électrique.

« Jeanne ? »

Pas le temps de chercher, la bestiole violette revenait à la charge en vomissant un épais brouillard noir. Laurel se couvrit le nez mais ce n’était pas une attaque toxique. Brouillard. Impossible de trouver le monstre. Impossible de frapper à l’aveugle sans risquer de blesser quelqu’un.

« Malta, ne fais rien ! Essaye de retrouver Invar. »

Il fallait qu’elle trouve Jeanne pour la sortir de là. Le pokémon poison était à bout de force. Et le brouillard était clairement une technique de dernier recours. Quelle autre attaque pouvait-il utiliser dans une situation aussi désespérée ?  Elle avançait à tâtons lors qu’elle marcha sur un truc visqueux qui couina. Le Métamorphe. Laurel l’attrapa par le cou pour le coincer dans sa ceinture. Ce truc restait avec elle, qu’il le veuille ou non.

« Jeanne ? Où es-tu ? » cria-t-elle inquiète.

Elle était empoisonnée mais pour la soigner il fallait déjà se débarrasser du Smogo. Pitié Xerneas, fait qu'elle n'ait rien. Fait que je la trouve à temps.

Malta avait rejoint Invar et le soutenait pour éviter qu’il ne se blesse mais elle ne pouvait pas faire plus. Celui qui arriverait à trouver le Smogo mettrait fin au combat. Si le Smogo n’y mettait pas fin avant lui même.

Après tout, rien n’était plus puissant qu’une Explosion.

La lumière d’une attaque filtre à travers la brume. Ce ne pas la lumière du bout du tunnel mais ça pourrait aussi bien être le cas. Laurel avait déjà vu quelques Racailloux exploser, ça ne c’était jamais bien fini. Ses pensées allèrent aussitôt vers Jeanne qui était quelque part dans cette masse noire. Elle priait les dieux qu’elle se soit éloignée, qu’elle soit en sécurité. La Ranine ferma les yeux, se préparant à encaisser l’Explosion du Smogo.

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La détonation ne vint pas. Laurel ouvrit un œil. Jeanne retirait son cimeterre du ventre de la bête. Triomphante. La joaillière se laissa tomber par terre. Elle entendit un petit couic! de protestation venant du Métamorph mais n’en avait cure. L’adrénaline était en train de retomber et elle réalisait à peine qu’elle avait participé à son premier combat et gagné. Bon, Jeanne avait gagné. Mais elle avait aidé, un peu. Pas beaucoup. Elle s’était battue c’était déjà pas mal ! Et elle avait trouvé son Métamorph, ça méritait un petit cri de victoire.

Laurel se roula un peu par-terre en agitant les jambes, avant de se rappeler que non seulement elle n’était pas seule mais que Jeanne était blessée. Elle se releva d’un bond, ce qui lui valu un autre couic! de protestation. Malta allait bien, le reste semblait en assez bonne santé aussi. On ne pouvait pas en dire autant de Jeanne.

La femme était courbée sur son cimeterre qui semblait supporter tout son poids. Sa peau généralement pâle semblait presque translucide. Laurel regardait avec horreur le sang qui coulait de son nez et tâchait la commissure de ses lèvres. Le poison. Pendant quelques instants d’euphorie elle avait oublié que son amie était empoisonnée. La joaillière s’élança derrière son mentor.

« Jeanne ! Par tous les dieux, laisse moi t’aider ! » la gronda-t-elle en l’attrapant par la taille. « Âtre, est-ce que tu peux aider Invar ? » elle reporta son attention sur la femme qu’elle soutenait « Ne fais pas ta tête de bourrinos et assis-toi là. »

Elle l’aurait bien soulevée dans ses bras mais, la guerrière était suffisamment bornée pour prendre ça comme une insulte. L’angoisse se tapissait dans les entrailles de Laurel, elle ne savait pas traiter le poison. Elle se rappelait vaguement qu’elle avait quelque chose dans son sac en cas de pépin. La Ranine utilisa sa carrure pour forcer son mentor à s’asseoir. Elle posa sa main sur son front pour vérifier si elle n’avait pas de fièvre. Zut. La femme était brûlante.

« Tourmaline ma chérie, est-ce que tu peux demander à Nival de faire des glaçons ? » elle se tourna ensuite vers Jeanne en la pointant du doigt «  Toi, tu te couche et tu bouge pas de là. »

Elle entreprit ensuite de fouiller le sac de Jeanne à la rechercher de quelque chose qui pourrait l’aider. Ô combien elle haïssait s’immiscer dans ses affaires ainsi mais c’était un moment de crise. Elle trouva quelques fioles colorées. L’une était verte, l’autre bleue. Il y en avait une orange aussi. Laquelle était un antidote ? Rappelle-toi Laurel ! De quelle couleur sont les antidotes dans les livres ? Scintillant … Scintillant tel … une ambre ! Scintillant tel une ambre, le breuvage salvateur qui venait réparer les maux du démons. L’ambre c’est orange. La troisième fiole ! La joaillière attrapa la fiole ambrée pour retourner auprès de Jeanne, qui tremblait de tous ses membres.

« Hey, ça va aller. » dit-elle doucement « J’ai trouvé l’antidote. »

Laurel souleva doucement la tête de Jeanne pour la poser sur ses genoux. Elle déboucha la fiole pour la verser doucement entre ses lèvres jusqu’à la dernière goutte. Elle reposa la fiole vide, pour dégager le front de sa vaillante et ô combien courageuse guerrière.

« Qu’est-ce qu’il t’a prit de charger toute seule ? » demanda-t-elle doucement.

Elle glissa doucement son pouce sur la joue de la femme, la regardant avec tendresse. Sa brave guerrière, sans peur et sans conscience du danger.

« Malta, est-ce que tu peux rallumer le feu et apporter une couverture ? »

La Carmache laissa Âtre s’occuper d’Invar pour traîner un bout de tissu jusqu’aux humaines. Elle détestait faire le chien-chien mais elle pouvait sentir la tension de sa dresseuse et préféra garder son égo pour plus tard. Il serait toujours temps de se venger. Le tissu tomba mollement sur Jeanne avant que Malta ne se retourne pour rallumer le feu. Il n’y avait plus qu’à attendre Tourmaline et Nival qui devaient revenir avec des glaçons.

« Au fait, je suis désolée de t’annoncer ça mais ton Goupix il est défectueux. Il fait de la neige. C’est pas grave que j’aime quand même. On fera un groupe de gens nés avec handicap. » lâcha-t-elle pour détendre un peu l’atmosphère.

Laurel écoutait tendrement Jeanne parler. Si elle pouvait râler et donner des ordres c’est que déjà, elle allait mieux. Et cela ne pouvait pas rendre Laurel plus heureuse. Quelle frayeur tout de même. Si elle s’était trompée de potion, elle aurait pu … La Ranine ne préférait pas y penser. Son mentor était en vie, les ennemis étaient vaincus et le Métamorph sécurisé.

Puis les paroles de Jeanne arrivèrent jusqu’au cerveau de Laurel. Elle était fière d’elle ?! Jeanne était fière d’elle ! Par tous les dieux ! Jeanne avait dit qu’elle était fière d’elle ! C’était le plus beau jour de sa vie. Elle avait pu faire honneur à son mentor durant ce combat, encore mieux elle l’avait impressionnée. Le sourire de Laurel était éclatant. Il faisait s’illuminer son visage entier.

« Je suis fière de toi moi aussi ! » répondit-elle.

Ça n’avait pas de sens et ça lui importait peu. Cette femme, cette incroyable femme venait de la complimenter. Elle regarda le duo de pokémon s’approcher. Gentiment elle prit les glaçons de Nival en remerciant les deux pokémons. Pendant que Jeanne s’émerveillait du miracle vivant qu’était son pokémon, Laurel mettait les glaçons dans un tissus. C’est fou que ce Jeanne remuait sur ses genoux ! Les malades c’est supposé rester au lit ! Ou tout du moins c’est ce que ça mère ne cessait de répéter parce que Laurel n’avait jamais su rester immobile trop longtemps. Elle ramassa son petit fardeau gelé lorsque Jeanne se mit à balbutier les joues soudainement rouges.

« Tout va bien ? C’est le poison ? » demanda Laurel paniquée.

Mais Jeanne se planquait sous la couverture. La Ranine prit peur elle approcha son visage de celui de sa mentor pour mieux l’entendre. Chemise ouverte. Regardé. Pardon. Bah, pas de quoi en faire tout un plat. Laurel faisait toujours attention à respecter la vie privée des gens et si Jeanne ne voulait pas qu’elle regarde sa chemise ouverte alors il n’y avait pas de problème.
Sauf que Jeanne ne portait pas de chemise.
Et que Laurel si.

« Oh, merde. »

C’était au tour de Laurel de passer rouge pivoine en croisant son bras sur sa poitrine. Non seulement elle était dénudée mais en plus elle était couverte de boue. C’était tellement embarrassant. Elle était dégoûtante et avait probablement tâché les vêtements de Jeanne en prime. C’était une catastrophe. Elle s’excusa promptement pour se dégager de dessous Jeanne et filer derrière un arbre pour se changer. Jeanne avais vu … oh par tous les dieux.

« Grand Arceus ait pitié de moi. » murmura-t-elle.

Elle retira rapidement ses vêtements souillés. Et libéra par la même occasion le Métamorph. Elle devait enlever la boue avant d’enfiler ses nouveaux vêtements mais pour atteindre l’eau il fallait traverser le camp. Et traverser le camp c’était passer devant Jeanne. Et Jeanne avait vu...

« Maltaaaaa ? Tu veux bien venir ici ? » appela Laurel.

La Carmache arriva en traînant des pattes. Le Métamorph n’osait pas trop bouger, terrifié par Laurel. Peut-être craignait-il de se faire écraser une autre fois ? Malta elle n’attendait qu’une excuse pour se venger de la demande de toute à l’heure. Excuse que lui donna la Ranine sans le réaliser.

« Tu peux utiliser Hydoqueue pour que je me lave ? » demanda-t-elle.

Les dragons ne pouvaient pas sourire. Ils n’avaient pas les muscles pour. Mais l’expression qu’il y avait sur le visage du pokémon dragon ne pouvait s’apparenter qu’à cela. Un sourire malsain qui ne prévoyait rien de bon. Laure n’eut pas le temps de réaliser son erreur que Malta claquait violemment sa queue au dessus de la tête de la joaillière, l’aspergeant d’une trombe d’eau glaciale. Le Métamorph applaudit et en redemanda encore. Laurel écarquilla les yeux horrifiée juste à temps pour se prendre une autre douche. Les deux pokémons sol étaient pliés en deux. Laurel les chassa en les insultant mais elle l’avait un peu cherché aussi. Malta repartit tout heureuse avec son Métamorph tout aussi heureux sur la tête. Laurel enfila rapidement ses vêtements de rechange.

« Mes pokémons me détestent. » se plaignit-elle.

Maintenant, il fallait retourner auprès de Jeanne et assumer ce qu’il s’était passé. Laurel pris une grande inspiration et sortit de derrière son arbre. Voilà qu’elle était encore une fois rouge cramoisi. Elle fit un léger détour pour ramasser sa dague et une Captis Ball. Elle s’arrêta devant le duo qui se croyait comique.

« Malta et mon cher Métamorph. - Il faut que je te trouve un nom d’ailleurs. - » Elle jeta un coup d’oeil au livre ouvert non loin. « Kurana. Ouais, ça passe. JE DISAIS DONC, ma chère Malta et mon cher Kurana, que vous êtes punis dans vos… chambres. Donc Malta tu bouge pas de là et Kurana tu rentres dans la Ball. » gronda-t-elle les deux pokémons.

Ils s’échangèrent un regard peu convaincu de ses menaces. Pourtant, la Carmache échangea quelques mots avec la bestiole rose qui eu un autre de ces sourires  narquois avant de rentrer dans la Captis Ball qui était tendue. Laurel reposa la Ball à côté du dragon sans vérifier si le pokémon était rentré dedans, avant de se décider retourner au près de Jeanne.

De tout manière il allait bien falloir qu’elle lui face fasse à un moment ou un autre. Et puis, il y avait une petite brise qui se levait et quitte à ce qu’elle ait vu ça elle pouvait bien abuser un peu. Elle posa la dague devant Jeanne avant de déclarer :

« Tu peux la prendre pour remplacer la tienne. »

Un vent frais fit voler quelques feuilles. Laurel fut parcourue d’un frisson. Maintenant que le calme était revenu elle pouvait sentir des courbatures qui tiraillaient ses muscles, certainement le résultat de l’attaque de la sardine. Jeanne avait l’air bien confortable sous sa petite couette et elle était tellement mignonne lorsqu’elle était gênée qu’au final, Laurel décida de mettre son amour propre de côté. Jeanne l’avait vu faire pire. Pour soulever la couverture et se glisser dessous.

« J’ai froid. Tu monopolise la couverture. Et j’ai envie de te faire un câlin parce que t’es trop mignonne et que tu m’as foutue une peur bleue. » expliqua-t-elle rapidement.

Laurel attrapa ensuite Jeanne, pour la serrer dans une étreinte enjouée. Elle lui fit un bisou sur le crâne en rigolant.

« Alors comme ça on me voit toute nue et on ne dit rien ? » charia-t-elle. « T’as de la chance d’être malade parce que sinon c’était la vengeance des chatouilles. »

Elle lui fit un autre bisou.

« Tu m’as vraiment fait peur tu sais. T’es trop précieuse pour qu’on te perde avec un truc aussi idiot. »

Elle n’avait pas réalisé à quel point le contact physique de cette dernière lui avait manqué. Laurel espérait juste qu’elle allait pouvoir profiter de Jeanne un peu plus longtemps sans interruption extérieure du style, dragon rancunier ou Métamorph légèrement sadique.

Laurel rayonnait de joie en entendant Jeanne se justifier. Elle n’était pas chatouilleuse ? Eh bien n’était une théorie que la Ranine était prête à mettre à l’épreuve. Peut-être pas tout de suite par contre. Sentir la femme poser sa tête dans son cou fit naître quelques papillons dans son estomac. Elle fit attention à ne pas bouger de peur de briser ce moment féerique. C’était tellement rare que sa compagne lui fasse des câlins, elle était toujours la première à les initier. Non pas que ça la dérangeait mais, voir que l’autre les appréciait peut-être un peu lui fit chaud au cœur.

Elle allait répliqué à sa décision de prendre des « risques » lorsque Jeanne passa son bras autour de sa taille. Laurel retint de justesse un couinement de surprise. Jeanne lui faisait un câlin ? Est-ce que les attaques avaient fait plus de dégâts que prévu ? Elle semblait si paisible ainsi blottie contre elle. Pourtant, ses mots semblaient dire le contraire. La joaillière l’écouta parler silencieusement. L’esprit tumultueux.

Elle savait ce que son cœur voulait, ma sa raison la tourmentait. C’était une assassin, un bandit qui pillait et tuait au nom d’un être incorporel et omnipotent. Elle était la représentation vivante de ce qu’elle devait combattre si elle devenait Chevalier. L’ennemi qui était si facilement abattu par la lame de la justice. Et pourtant, Laurel se moquait de cette réalité et ses idéaux. Jeanne valait dix fois le plus brave des héros. Le monde n’était pas noir et blanc. Et pour une fois, la Ranine appréciait ce spectre de couleurs.

« Je peux te le dire ? » demanda-t-elle doucement en haussant ses sourcils. « Est-ce que je peux te le montrer aussi ? »

Elle leva sa main pour caresser la joue de Jeanne. Laissa ses doigts goûter à la douceur de sa peau. Son regard se perdit dans celui de la femme. Elle n’avait jamais remarqué le bleu sombre de ses yeux qui rivalisait avec le plus pur des saphirs, le rouge légèrement effacé sur ses lèvres délicates. Elle rêvait l’interdit, tant de nuits passées à regretter et espérer. Qui aurait cru qu’un simple acte, une hésitation, pouvait avoir de si lourdes répercutions ? Laurel avait toujours visé les étoiles, aujourd’hui peut-être, elle pourrait les effleurer du bout des lèvres. Elle posa tendrement ses lèvres sur celles de la femme qui la tenait dans ses bras. Les liants dans un chaste baiser qui n’avait que trop attendu. Elle était, là où elle devait être, avec celle avec qui elle devait être.

« Je t’aime, Jeanne. » souffla-t-elle. « Et j’ai été une folle de ne pas l’avoir réalisé plus tôt. »

Elle lui sourit, cherchant à marquer son visage, ce moment, cette émotion dans sa mémoire. Elle avait été une folle et une égarée, peut-être pouvait-elle se forger un pardon.